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AccueilJournalNuméros parus en 2005N°42 - septembre 2005 > La culture, un héritage, pas une cage

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Dossier : Pour la diversité et l’interculturalité

La culture, un héritage, pas une cage



Le soit disant "choc des civilisations", c’est l’histoire de l’humanité qui se noie dans une flaque de sang. Guerre en Irak, terrorisme, conflits communautaires, progression de l’extrême droite dans la plupart des pays d’Europe. Nous en sommes encore là, seules des mouvements sociaux d’ampleur et d’autres mises en application de coexistence pourront renverser la vapeur.

En 2005, dans un pays qui se considère supérieur comme la France, on en est encore réduit à expliquer qu’être "arabe", pour parler celle d’en bas, c’est pas génétique. Les enfants ne naissent pas avec une casquette Nike vissée sur la tête, ou une barbe, ou un tchador. Lorsqu’on observe des enfants évoluer dans une crèche, par exemple, on se rend compte, si besoin est, que les gosses certes expriment déjà un caractère individuel, mais n’ont par contre aucune barrière de couleur ou de culture.
Aujourd’hui lorsqu’on s’appelle, au hasard, Haffid ou Baïja et qu’on vient d’un quartier pauvre, on peut faire tout ce qu’on veut comme étude mais les personnes ont de grande chance de finir au Mac Do ou à l’ANPE. Pour certaines, le repli vers le deal est une solution. Quitte à être niquer, autant niquer aussi les gosses des classes moyennes. Oh que d’effroi chez le français moyen : mais un "arabe" qui deale du chichon ou qui crie en bas de l’immeuble le soir, franchement, est-ce pire et plus violent que les petits blancs qui apprennent à devenir des prédateurs dans des écoles de commerce ou des ressources humaines... Sans compter que tous les "arabes" (en fait "français" si la nationalité a une importance) ne dealent pas, et qu’on met de côté souvent les frasques des "français" blanc - le racisme est aussi dans ce qu’on oublie de considérer. Au final, un djeune reste un djeune, quelle que soit la couleur de l’épiderme. Son parcours n’est pas de sa seule responsabilité, loin de là, il dépend aussi du contexte. C’est terrible mais ça ne tombe pas du ciel : la société récolte ce qu’elle sème, c’est à dire pas grand chose de bien. Cela n’a rien de "génétique" ou d’une fatalité, le monde n’est pas une suite de hasards incongrus, l’histoire c’est nous tous qui l’écrivont, par nos engagements ou nos renoncements.

Si la théorie du choc des civilisations, c’est à dire la guerre inéluctable entre deux cultures soi-disantes étanches, était juste nous vivrions dans un état de guerre permanent. Ce n’est pas le cas. Les attentats, est-ce utile de le préciser, sont des actes abjectes, inacceptables quelle que soit la cause ou le contexte, mais ils restent minoritaires par rapport d’une part aux moyens techniques, d’autre part par rapport au faible nombre de personnes qui les perpètrent, et enfin par rapport aux problèmes sociaux rencontrés.
Car le problème se situe là. Les fondamentalismes, et des dirigeants comme Tony Blair le reconnaissent, naissent de deux formes de misère :
- une misère culturelle et intellectuelle : si l’on "comdamne" la religion musulmane, que penser alors des autres religions ? Que penser, surtout, du consummérisme et de l’acculturation capitaliste ? Pourquoi juger l’un et pas l’autre ? Pourquoi notre prétendue civilisation, société de consommation n’est-il pas plus juste, serait-elle supérieure ?
Parce qu’on est capable de hurler toute une nuit si une équipe de foot a gagné ?
- la mondialisation capitaliste : des inégalités qui progressent dans le Nord comme dans le Sud, des pays pillées, des poches d’apartheid sociale de plus en plus proche. Les restrictions du FMI empêchent les paysans du Sud de pratiquer une agriculture vivrière, souvent sous la menace des armes des Etats, et ceux-ci viennent gonfler les flux migratoires, qui sont des déplacements d’êtres humains, qui font ce qu’on ferait sûrement dans le même cas qu’eux.

Les replis nationalistes et intégristes sont la solution par défaut pour des pans entiers de la population. On recherche une culture idéale, primitive, qui serait source de bonheur ou d’équilibre par rapport à une accélération capitaliste qui nous mène droit dans le mur. Se recréé ainsi des repères, bricolés, imaginaires. Une culture serait un dogme recréé de toutes pièces et non pas un héritage dont nous aurions une libre disposition.
Pour autant, ces mêmes cultures, à de rares exceptions près (aborigènes, Inuïts) se sont construites par des échanges et suite à des flux migratoires. Lorsque nous parlons d’interculturalité, en fait les représentations que l’on se fait de la culture dite française ou européenne sont déjà issues d’échanges anciens, d’interculturalité antérieure. A l’heure d’une part de la monoculturalité capitaliste, fondée sur la violence, le culte de la nouveauté et de la jeunesse, de la rentabilité, et des replis sur des cultures anciennes d’autre part, nous devons élargir et approfondir d’autres modes de vie.

Car c’est bien autour d’autres façons de vivre, plus solidairement, plus en lien avec la nature, et en rupture avec l’usure du temps capitaliste, que nous pourrons dégager d’autres cultures plus solidaires et ouvertes, que naîtront d’autres repères. Cela sera le sujet de la seconde partie du dossier, dans le prochain numéro...

raph.


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