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AccueilJournalNuméros parus en 2007N°61 - Septembre 2007Permanence des ressources et revenu garanti - Partager et transmettre > ENTRETIEN AVEC JOSY

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Permanence des ressources

ENTRETIEN AVEC JOSY

Témoignage


Josy a participé à un collectif autonome de précaires en Corrèze, qui a été actif pendant et après le mouvement des chômeurs de l’hiver 1998. Au-delà de la question « échec ou réussite », cette lutte a-t-elle développé une forme de permanence des ressources ?


No Pasaran : Peux-tu nous résumer ta vision et ta participation au mouvement des chômeurs ?

Josy : Il fallait regrouper nos énergies pour contrer ce gouvernement (celui de Jospin) qui ne faisait rien pour les chômeurs et les pauvres... A l’époque, j’avais aussi de graves problèmes pécuniers qui me prenaient la tête et c’est vrai que si c’était ma vision politique, j’étais aussi pressé par le manque d’argent, il fallait chercher et trouver du travail. On a fait un peu bouger les choses...

Le « pécunier » [1], c’était l’unique motivation ?

Au début, oui, parce que j’avais ma fille. Les socialistes ne voulaient pas, et ne veulent pas, partager les richesses, pas plus que la droite.

Après, tu as développé une critique du travail ?

Développé, c’est ça, car effectivement j’ai toujours eu cette critique dans un coin de la tête, dans les années 1960-1970 je participai à des communautés etc. mais une fois que ça s’est cassé la gueule j’ai réintégré le monde du travail. Je n’arrivais pas à retrouver d’autres personnes qui avaient une critique du salariat, donc j’ai fait avec ce qu’il y avait. Jusqu’à tomber sur d’autres militants pendant le mouvement, de Brive et d’ailleurs, comme à Limoges. Le droit à la paresse existe et j’ai pris conscience du fait que ce n’était pas de « ma faute » si je ne trouvais pas de travail - de toute façon les boîtes ne voulaient pas d’une mère de famille de mon âge, dans la région, on trouve rien.

Mais j’ai été contente de tomber sur d’autres personnes qui parlaient de droit à la paresse. Passer sa vie à tout donner un patron, quelle plaie ! Il suffit d’un peu de recul pour se rendre compte qu’on gâche sa vie, on passe totalement à côté, et en plus, bien souvent, pour faire des conneries pendant ses heures, comme bien souvent dans le privé. C’est absurde ! Moi, j’en avais ras-le-bol de donner aux patrons ! Ce mouvement et toutes ces rencontres ont été salutaires, vraiment ! Après, je n’avais plus envie de travailler à nouveau comme avant. 8 heures par jour, travailler pour travailler, sans rien à vivre d’intéressant à côté, les gens se rendent-ils comptent ce à quoi ils passent leur vie ?!

Penses-tu que le mouvement se soit conclu par une victoire ou une défaite, ou y a-t-il une autre lecture possible ?

Je ne dirais pas que cela a été un échec... J’ai appris pas mal de choses. Cela a fini trop tôt. On aurait dû aller plus loin. Le mouvement a été trop docile par rapport à une élite de gouvernants, y compris nos pseudo porte-parole qui parlaient au nom de tous, on a jamais su pourquoi. Mais cela a permis de nous trouver. Pas un échec, au contraire. Il me semble que la fin n’est pas finie (sourire). Je suis prête à le refaire. Je pense que des gens sont actifs, ne veulent pas se laisser faire, potentiellement nous sommes nombreux même si tout le monde n’a pas pu s’intégrer... L’autre souci, et d’après moi c’est un grave problème qui nous freine, c’est qu’on n’est pas assez médiatisé. Bien sûr, les médias marchands ne vont pas nous faire de la pub, mais on va pas trop vers eux non plus. Chaque fois qu’on a essayé en Corrèze, ça c’est bien passé non ? Par exemple, on est passé sur Chérie FM, une interview et tout, en intégral, puis aussi dans La Montagne (journal local) et on n’a pas été trop trop coupé sur le plan politique. La plupart des journalistes sont des raclures qui sont aux ordres, mais il faut voir au cas par cas. Je pense que passer dans des télés régionales comme France 3, c’est possible, et utile. Nous avons besoin de caisse de résonance pour nos actions et on doit en discuter...

Penses-tu que ce mouvement ait créé une permanence des ressources  ?

Oui, je pense, heureusement d’ailleurs ! On se voyait pendant et après le mouvement, pour du soutien, faire un jardin, des sorties culturelles... Pour moi, cela a été constructif, si cela n’avait pas existé je serais encore dans les limbes ! Si l’on me demande d’y replonger, j’y vais ! C’est resté quelque chose d’inachevé, comme un film à la fin insatisfaisante, il en faut donc un deuxième, espérons qu’il sera au moins aussi bien si ce n’est mieux. Il faut que tu mettes aussi que le mouvement a permis des solidarités pécuniaires, et sans elles je sais pas où je serais. Ce sont des précaires qui m’ont aidé, pas l’Etat ! Cela m’a permis de tenir moralement. Et le mouvement des chômeurs, cela a été aussi une thérapie solidaire. L’union fait la force... Tout cela fait une chaîne, car aujourd’hui je milite encore, par exemple je suis au réseau « Sortir du nucléaire », je participe à la CNT quand je peux, et je fais du théâtre avec Peuples et Cultures.

Très peu de personnes s’intéressent à la presse alternative. Et toi, lis-tu par exemple No Pasaran ?

Bin oui, bien sûr. Et ce que je trouve positif avec No Pasaran, c’est tous ces jeunes motivés, prêts à se battre. Et le tout dans une atmosphère conviviale...

Militeras-tu dans les prochains mois ?

Ah, quelle blague, tu me poses la question ?! Bien sûr que je militerais, tu crois pas que je vais les laisser faire ! Pas de problème, je suis prête à tout !


[1] On sait que « pécunier » est un barbarisme, mais justement...


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