Retour accueil

AccueilJournalNuméros parus en 2008N°65 - Janvier 2008 > Mexique : 10 ans après le massacre d’Acteal

Rechercher
>
thème
> pays
> ville

Les autres articles :


Solidarités Internationales

Mexique : 10 ans après le massacre d’Acteal


10 ans après le massacre, les commanditaires n’ont toujours pas été inquiétés. Des menaces pèsent à nouveau sur de nombreux municipes autonomes zapatistes. Des mobilisations ont eu lieu au Mexique et dans d’autres pays.


Acteal, le 22 décembre 1997, 45 hommes, femmes et enfants ont été tué-es par environ 70 paramilitaires. Une patrouille de la police d’Etat se trouvait à 200 mètres, mais n’est pas intervenue, sauf pour organiser un cordon sanitaire afin d’empêcher quiconque d’approcher, avant d’effacer les preuves du massacre. Ces faits ont eu lieu un an et neuf mois après la signature des accords de San Andres, censés garantir le respect des droits des zapatistes (auto-organisation, autogestion, occupation des terres selon l’article 169 de l’OIT...).

10 ans de “ guerre de basse intensité ”

Gloria Muñoz Ramírez écrit dans sa rubrique “ Los de abajo ” (“ Ceux d’en bas ”, dans le quotidien mexicain La Jornada) : “ incendies de villages, agressions avec armes à feu et armes blanches, emprisonnements, invasions, destruction de biens, font partie des agressions quotidiennes que subissent les peuples zapatistes ”. Désormais cette guerre ne semble plus se limiter aux terres zapatistes, mais s’étendre à travers le Mexique, comme on a pu le voir par exemple avec la répression de la “ Commune de Oaxaca ” en 2006.

Felipe Calderon (dit Fecal), actuel président du Mexique, a récemment décidé d’intégrer dix mille membres de l’armée de terre et de Préventive (équivalent des CRS). C’est cette unité anti-émeutes qui a chargé à Oaxaca et à Atenco. Ses méthodes de contre-insurrection vont très loin dans la violence physique et symbolique. Un des exemples les plus rapporté étant l’utilisation du viol systématique, le préservatif étant une arme comme une autre à côté de la matraque et du pistolet de service.

Il y a actuellement une nouvelle intensification des actions paramilitaires contre les bases d’appui zapatistes. Ainsi par exemple autour de Bolon Ajaw, qui dépend du Caracol de Morelia, les tensions organisées rappellent celles qui avaient précédé le massacre d’Actéal.

Un vaste plan de répression est donc mis en place pour détruire le mouvement zapatiste, et pour réprimer la contestation dans les états du Guerrerro, de Oaxaca, de Morélia, de Sonora, du district fédéral de Mexico...

Révisionnisme précoce

Dans le même temps, le gouvernement mexicain cherche à nier sa propre responsabilité pour Acteal. Certains fusibles ont sauté, comme le gouverneur du Chiapas de l’époque, Julio César Ruiz Terro, ainsi que le ministre de l’intérieur Emilio Chayffete Chemor, mais aucun des commanditaires du massacre n’a été poursuivi.

Un certain Hector Aguilar Camin a produit récemment dans la revue Nexos trois longs articles sur Acteal, dans lesquels il soutient la thèse que le massacre aurait été une bataille entre paramilitaires et zapatistes qui aurait dégénéré en massacre de civils. Cette offensive sur la mémoire en anticipe probablement d’autres.

Solidarité nationale et internationale

C’est dans ce contexte que les gens de Las Abejas, à l’occasion de la commémoration du dixième anniversaire du massacre, ont organisé, du 20 au 22 décembre, les “ premières rencontres nationales et internationales contre l’impunité ”. Sont venues près de 220 personnes de 14 états du Mexique, 13 pays et un total de 53 organisations différentes. En février des observateurs de la Commission Civile Internationale d’Observation des Droits Humains (CCIODH) viendront de France, Allemagne, Italie, Suisse, Danemark, USA, Espagne et Canada...

Le 22 décembre, des mobilisations se sont également déroulées à Naples, Barcelone, Los Angeles et Münster. A Paris, un rassemblement s’est tenu à la fontaine des innocents, avec le CSIA, France Amérique latine, Terre et liberté pour Arauco, Échanges solidaires, Altercultures, la revue Volcans, le MRAP, la CNT, le Scalp Reflex et Alternative libertaire. Le PCF était également signataire (mais apparemment aucun-e militant-e n’était présent-e).

La sono du Scalp-Reflex permettait, outre la diffusion de musique, de haranguer la foule. Sur la table de presse, et aussi sur des banderoles et des panneaux tendus entre les arbres, on pouvait trouver des informations sur la tentative d’implanter par la force des agrocarburants au Chiapas (comme ça s’est fait en Colombie, cf. les émissions de Chao, Anquetil et Mermet sur la-bas.org), sur le développement du Plan Puebla-Panama (conquête du Chiapas par des multinationales), sur la collaboration policière franco-mexicaine, ou sur la production et le commerce solidaire du café Mut Vitz, dont nous avons vendu des paquets, ainsi que des gobelets de café chaud à prix libre.

Du 22 décembre 1997 au 13 janvier 1998, il y avait eu des mobilisations dans 130 villes de 27 pays. Dix ans plus tard, les mobilisations ont continué mais avec une force moins grande. La situation est donc plus préoccupante que lorsque les esprits étaient attentifs. Comme l’écrit Gloria Muñoz Ramírez : “ Les communautés zapatistes résistent et font leur partie... ”.

Le rassemblement du 22 décembre n’était pas une action humanitaire mais politique. Les zapatistes sont des camarades de lutte, nous combattons les mêmes systèmes et ce sont souvent les mêmes multinationales qui agissent ici et là-bas. En général les gens ne s’intéressent pas au Mexique ou aux zapatistes mais ils ont tendance à réagir en apprenant qu’une partie de leurs impôts sert à financer la répression du peuple mexicain pour le bénéfice de Matra, Dassault, Lagardère etc., qui équipent l’armée et la police mexicaines.

Dans le dossier du mois prochain, qui portera sur le zapatisme, un article sera consacré à ce sujet.

L’année 2008 marque les 10 ans de la collaboration policière entre le Mexique et la France. Désormais les entreprises qui vendent le plus d’armes au Mexique sont françaises. Lançons dès maintenant une campagne d’information, de réflexion et d’actions.


No Pasaran 21ter rue Voltaire 75011 Paris - Tél. 06 11 29 02 15 - nopasaran@samizdat.net
Ce site est réalisé avec SPIP logiciel libre sous license GNU/GPL - Hébergé par Samizdat.net