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AccueilJournalNuméros parus en 2008N°65 - Janvier 2008 > UN NOUVEAU CODE DU TRAVAIL POURRAIT S’APPLIQUER LE 1ER MAI 2008

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UN NOUVEAU CODE DU TRAVAIL POURRAIT S’APPLIQUER LE 1ER MAI 2008

« Plusieurs mois voire plusieurs années seront nécessaires pour que ce nouveau code révèle tous ses secrets. »


Cette phrase de Christian Redé, un de ses rédacteurs, pose bien le sujet. C’est en février 2005 qu’une commission de 5 personnes est créée en application d’une loi de décembre 2004 visant à réécrire le code du travail, à droit constant, pour le simplifier.


En automne 2006, suite au CPE, un report est décidé, et en décembre un cavalier parlementaire (article « hors sujet » glissé dans une loi, généralement budgétaire) le relance. En réaction les syndicats, certains parlementaires et juristes commencent à très fortement s’inquiéter et à communiquer sur le sujet.

Mardi 4 décembre 2007, dans la nuit, a eu lieu l’examen d’une loi ratifiant l’ordonnance relative au code du travail. Les députés dit « de gauche  » ont déposé plus de 150 amendements, pour limiter autant que faire se peut les modifications de droit, et pour une fois ont essayé de faire ce pour quoi ils ont été élus. Enfin après avoir voté quelques uns des amendements, ils ont réussi à bloquer et reporter le vote final en utilisant le règlement du parlement rendant obligatoire la présence d’un quorum de député. En passant, on peut remarquer que l’investissement de nos trop chers représentants sur un sujet pourtant moins futile que l’interdiction des chiens soi-disant dangereux ne permet pas de remplir l’hémicycle.

Notons quand même que les députés ont dû examiner un texte qui permet l’application d’un code inachevé. Ainsi, ils devaient se prononcer sur un ensemble comportant une partie réglementaire non encore finalisée, ni même présentée.

Quel est le résultat de toutes ces manoeuvres ?

On remarque tout d’abord l’énorme effort de simplification commis, on passe d’un code à 9 livres, 271 subdivisions, comportant 1891 articles de loi à un code numéroté à 8 parties, 1890 subdivisions et 3652 articles, ce dont même les dangereux gauchistes du Medef se plaignent.

Accessoirement les jurisprudences devraient s’effondrer et environ 500 lois sont déclassées en décrets. Ce déclassement permettra au gouvernement de modifier le code plus facilement, sans avoir à déranger le parlement avec une proposition de loi, des débats, et autres travaux ennuyeux.

Mais le résultat final est que le fond et l’esprit du code subit des changements.

Comme chacun le sait simplifier est un synonyme de réduire, vu que l’on augmente le nombre d’article, pour compenser il va falloir réduire les droits des salariés, les devoirs des entreprises et les capacités de surveillances des inspecteurs du travail et autres institutionnels. Les patrons étant de bons citoyens, il est donc inutile de prévoir des peines de récidive pour eux ou de leur rappeler qu’ils doivent obligatoirement faire certaines choses quand on peut leur dire que le faire suffit.

On retrouve ce juste constat dans la redistribution équitable des responsabilités en matière d’hygiène et sécurité. Ainsi lorsque l’employé se blesse stupidement en manipulant des produits ou des outils dangereux alors que son chef lui avait dit de faire attention, on ne peut décemment pas continuer à en vouloir au donneur d’ordre. Le nouveau code devrait corriger ceci, et le salarié sera enfin considéré comme une personne responsable elle aussi.

Toujours dans une volonté de recherche de la liberté et de l’amélioration de soi, le salariat sera plus facilement dépassé. Dans certains métiers (tels que le journalisme) ou pour les travailleurs étrangers (enfin les heureux sélectionnés qui auront le privilège de pouvoir passer quelques temps dans notre belle nation), la présomption de contrat de travail devra être éliminée. Dans le doute, tous ces gens sont des travailleurs indépendants, de vrais entrepreneurs. Les salariés agricoles (au sens large, on y trouve les employés du Crédit Agricole, les jardiniers...), les métiers « sociaux » (tel que assistants maternels, familiaux, éducateurs...), les mineurs, les salariés des entreprises de transport, d’EDF, de GDF et de la fonction publique seront exclus du code du travail. Les marins, dockers et certains enseignants verront aussi tout ce qui aurait pu les concerner être envoyé dans d’autres codes. L’idée est de diviser pour mieux régner. Cela permettra ainsi par exemple de ne plus avoir à afficher les horaires de travail aux salariés agricoles. Et franchement comment pouvait-on penser que ces métiers en voie de disparition ou de planqués aient put être faits par des travailleurs ? Le code du travail ne doit concerner que ceux qui en ont un vrai.

Pour apprendre très tôt que le travail salarié est un immense privilège le code aide les jeunes à voir la différence avec leurs statuts actuels.

Ainsi le contrat d’apprentissage ne devrait plus n’être que de la formation, pas du travail, les apprentis et les jeunes de moins de 18 ans verront leurs particularités disparaître, les apprentis ne seront donc plus des travailleurs mais des stagiaires. Et les inspecteurs du travail n’ont plus à surveiller quoi que ce soit sur ces sujets. Jusqu’à présent quand un tribunal des prud’hommes, probablement par erreur, venait à requalifier un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, ce contrat commençait à faire effet à la date du jugement. Imaginez le préjudice porté à l’employeur, obligé de considérer ce travailleur comme un de ses salariés alors même qu’il avait interjeté en appel. Pour corriger ça, grâce au nouveau code du travail, on attendra la fin de toute la procédure judiciaire pour, si vraiment on est sûr de le devoir, le requalifier.

De plus vous pouvez vous rassurer, si des erreurs de jugement sont souvent commises par les prud’hommes qui ont tendance à oublier que la justice doit être de classe, à l’avenir bien des cas ne passeront plus par eux, mais par les tribunaux normaux.

Pour aider les secteurs innovants qui ont compris que l’avenir était dans l’externalisation il sera plus facile de « prêter » de la main d’oeuvre, permettant à un plus grand nombre d’entreprises d’avoir les mêmes droits que l’intérim.

Dans un souci de transparence et de précision, les licenciements seront moins souvent qualifiés d’économiques et les indemnités de licenciement dépendront d’un décret.

On travaillera plus, le dimanche pourra bien plus facilement encore être travaillé, les heures astreintes et la durée maximale du travail seront moins surveillées ainsi nous seront tous plus libres de consommer et gagner de l’argent sans interruption.

Comme il est injuste que les hommes soient les seuls à avoir le privilège de pouvoir de par la loi porter des charges très lourdes ou faire certaines tâches dangereuses dans les entreprises familiales, le futur code du travail permettra enfin aux femmes de devenir les égales de l’homme sur ces sujets.

Des tas de petites modifications de terme ont été introduites, on ne parle plus précisément des tribunaux mais des autorités judiciaires, on ne parle plus d’employeur délinquant mais de personne condamnée, on ne demande pas l’application des dispositions de la loi et des règlements mais celle des dispositions légales...

L’inspection et la médecine du travail auront moins de pouvoir, les comités d’hygiènes et sécurités voient leurs rôles réduits et leurs noms changer, les autres instances du personnel et les représentants des syndicats ne restent pas non plus intouchés. Le travail étant une valeur sûre, saine, et bonne, il n’est pas utile de trop le surveiller.

Il y a bien trop de changements pour en faire la liste complète ici, mais l’idée générale est de détruire les acquis des travailleurs. Et cela fonctionne bien, dans une relative indifférence des médias.

Je conseille vivement à ceux qui sont intéressés par ces changements d’aller consulter :

Une analyse faite par un inspecteur du travail à la retraite :

http://www.cnt-f.org/59- 62/CASSE_...

Les minutes de la ratification de l’ordonnance à l’assemblée :

http://www.assembleenationale. fr/...


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