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AccueilJournalNuméros parus en 2008N°68 - mai juin juillet 2008 > La Lutte oui, la Fête aussi !

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Les lycéens s’organisent en soutien aux sans-papiers

La Lutte oui, la Fête aussi !


Depuis le début de l’année scolaire, des lycéens ont monté une initiative de soutien aux élèves sans-papiers et à leurs familles sur les lycées de l’Est parisien, et plus particulièrement dans les deux lycées du cours de Vincennes, Hélène Boucher et Maurice Ravel, le premier étant nettement moins impliqué que le second. Si cette initiative s’est renforcée au cours des deux mouvements qui ont secoué la vie lycéenne, celui qui s’est opposé à la LRU et celui qui refuse les suppressions de postes et les mesures pédagogiquement réactionnaires de Darcos, elle a également permis à de nombreux lycéens de rester mobilisés entre les mouvements, et de faire leurs premières armes militantes... avec un succès indéniable et réjouissant.


Au départ, il y a eu une première AG organisée par des élèves de classes prépas et de première d’Hélène Boucher : la situation des élèves sans-papiers y a été exposée, en même temps qu’une liste de contacts était établie, qui s’est révélée très utile lorsqu’il a fallu se mobiliser dans l’urgence, comme ce fut le cas, lorsqu’au retour des vacances de février, un élève sans-papiers a été convoqué au tribunal. Cette liste très réactive a en effet permis la présence au tribunal ce jour-là d’une soixantaine d’élèves (et quatre profs, une CPE et quelques parents d’élèves). À ce jour, le lycéen sans-papiers n’a toujours pas été fixé sur son sort, car la réponse des juges, prévue le 7 avril, a été reportée de quelques semaines pour plus de réflexion. Très vite, de nombreux projets ont émergé, portés par les 20-30 lycéens présents aux AG : dans l’optique de sensibilisation des autres élèves à la situation des élèves sans-papiers, ils leur ont proposé via des flyers de renseigner un questionnaire élaboré par RESF-Miroir. Ils ont ensuite organisé une projection débat à la Miroiterie, qui a rassemblé une quarantaine de personnes 14 octobre. Mais le projet qui leur tenait le plus à coeur et qu’ils avaient dans l’idée de réaliser dès octobre 2007, c’était l’organisation d’un grand concert de soutien, quelque chose qui pourrait toucher un maximum de lycéens et qui, en alliant la fête et la lutte, pourrait faire se rencontrer la nouvelle génération, consciente et capable de se mobiliser et de prendre les risques que tout mouvement lycéen implique (retard dans les cours, absences notifiées au rectorat, premières arrestations et tracasseries policières), et l’ancienne, celle des militants de RESF, du 9ème collectif et des libertaires.

Pour un groupe informel de jeunes lycéens qui n’avaient aucune expérience dans l’organisation de concerts, la tâche n’était pas si facile : pour trouver une salle, il leur fallait une affiche, et pour convaincre les groupes de jouer pour eux en soutien, il leur fallait une salle... Mais finalement, la salle leur a été prêtée gracieusement par la CIP-IDF, et l’affiche arrêtée à quatre groupes, dont les Brixton Cats. Puis les flyers et l’affiche ont été dispos, et la mobilisation des lycéens contre les réformes réacs de Darcos est venue, dans laquelle ils se sont impliqués  : elle leur a permis de parler de leur projet et de sensibiliser les autres lycéens, sans se limiter à ceux de l’Est parisien ; le bouche à oreilles a même mieux fonctionné que la diff des flyers.

Parallèlement, les contacts étaient pris avec le 9ème collectif pour permettre la tenue de trois débats (entre chaque groupe) : le premier, proposé par les lycéens et les étudiants, qui présentait leur action, le second où intervenait RESF-Miroir pour présenter les conclusions de leur questionnaire, publiées dans le livre La chasse aux enfants et questionner l’assemblée sur l’avenir d’une société qui expulse des enfants, et enfin le troisième où le 9ème collectif invitait à discuter sur le racisme et l’intégration des immigrés et sur les Centres de Rétention Administrative (CRA).

Leur objectif à plus long terme est une mobilisation nationale, d’ampleur, comme celle qui s’est opposée à la LRU ou qui s’élève actuellement contre les projets de Darcos : le problème, c’est que les lycéens (pas plus que les autres !!) ne se sentent pas forcément directement concernés par les problèmes des sanspapiers en général, alors que les lycéens mobilisés dans l’Est parisien ont réussi à dépasser le cadre de leur lycée pour arriver à des revendications qui concernent tous les sans papiers, dont ils réclament la régularisation, et les CRA dont ils exigent la fermeture. Ils suivent avec intérêt la grève des salariés sans-papiers, bien conscients que la lutte dans laquelle ils s’inscrivent a une histoire et doit être menée sur tous les fronts : au lycée, dans les écoles, dans la rue, dans les entreprises, dans les tribunaux, dans les centres de rétention, dans les aéroports...

Loin de se limiter à des arguments humanitaires, ils mettent en avant une dimension éthique de la lutte en soutien aux sans-papiers. Pour eux, il s’agit avant tout de liberté : chacun a le droit d’aller où bon lui semble dans le monde, et de s’installer où il veut. À ce sujet, ils ne font pas l’économie d’un questionnement sur les raisons qui poussent les gens à quitter leur pays pour venir s’installer en France. Enfin, ils refusent de vivre dans une société qui se baserait sur l’individualisme, ce qui est une contradiction dans les termes : leur expérience du collectif, au sein des AG lycéennes de soutien aux élèves sans-papiers, leur a montré la dimension primordiale du collectif. De fait, malgré les deux réunions hebdomadaires qu’il leur a fallu tenir plusieurs semaines avant la date du concert, malgré le travail énorme que tout ça leur a demandé, où chacun a trouvé sa place d’ailleurs, aussi bien les prépas et les première plus expérimentés, que les secondes dont c’était le baptême du feu, sans que personne tire la couverture, tout le monde est sorti plein d’enthousiasme de cette expérience. Ça a été un moment à la fois convivial et auto-organisé, plein d’échanges d’expériences, avec quelques incertitudes (on a failli manquer de bières, aargh !), mais pour nous autres de No Pasaran, ça a surtout été une rencontre avec une nouvelle génération de militants pour qui l’autogestion et l’autonomie sont primordiaux.

Avec une seule envie : recommencer dès que possible !★

Tina, avec le concours précieux de Chris, Pierrot et Zozo


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