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Entretien avec Laurent Cantet, réalisateur d’"Entre les Murs"



Que répondrais-tu à quelqu’un qui te dirait qu’il s’agit d’un film militant ?

Si être militant, c’est rendre compte de la complexité du monde, alors oui, c’est un film militant  ; si c’est donner des réponses à des questions, c’est non, car j’estime ne pas avoir de légitimité pour répondre aux problèmes posés par le film, qui d’ailleurs pose des questions en essayant d’éviter l’idéologie. En revanche, dans les rencontres autour du film auxquelles j’ai participé, j’ai eu le plaisir de voir les gens s’emparer du film et en débattre. D’une façon générale, si je me sens concerné par ce qui m’entoure, si j’ai souvent envie d’ouvrir ma gueule, je le fais de façon ponctuelle, et je ne suis pas dans une logique militante au sens où on l’entend généralement.

De quelle façon tes échanges avec les jeunes pendant le tournage ont modifié ta vision d’adulte de l’école, et donc l’orientation du film ?

Avant de démarrer le film, j’avais des hypothèses que je voulais vérifier. Un des points de départ du film, c’est la volonté de réagir à l’idée « école = fabrique de crétins » et à la stigmatisation des jeunes, surtout quand ils sont d’origine étrangère et mauvais élèves... J’avais envie de montrer que ces élèves étaient bien plus malins qu’on le croit et que je pouvais l’être à leur âge. À leur contact, c’est une hypothèse que j’ai pu largement vérifier ! Une des clés de la réussite du film, c’était que sa fabrication coïncide avec ce que le film veut montrer, c’est-à-dire un groupe qui produit de l’intelligence, même si ce n’est pas toujours facile, et que ce flot d’énergie est difficile à contrôler. Je voulais, avec ce film, rendre justice aux élèves, mais aussi aux profs, en montrant ce qu’ils pouvaient faire ensemble, sans en masquer les difficultés.

Quelles sont ta principale crainte et ton principal espoir au moment de la sortie dans les salles ?

Ma crainte principale, c’est qu’on me reproche de donner de l’école une image trop sombre, qui ferait de la pub à l’école privée et dégoûterait quiconque de devenir prof. J’appréhende aussi le fait que les gens lisent le film uniquement à travers leur expérience personnelle de l’école, en occultant ainsi le propos, et qu’au final on ne parle pas beaucoup de cinéma. Mais mon principal espoir, en plus de changer le regard porté sur les jeunes et l’école, est justement cette réappropriation du film, en particulier de la part des jeunes. Déjà, j’ai été heureux de voir dans les débats des ados prendre la parole (souvent pour réagir au discours au discours des adultes) et donner leur avis. ■


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