Accueil
> Journal
> Numéros parus en 2008
> Septembre Octobre 2008
> Evolution du paysage semencier et propositions stratégiques
|
||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Rechercher > thème > pays > ville Les autres articles :
|
EcologieEvolution du paysage semencier et propositions stratégiquesDeux événements récents sont révélateurs de l’accélération du bouleversement du paysage semencier mondial et français d’une part et de l’agenda qui en découle d’autre part : les conclusions du Grenelle de l’environnement dans le cadre de la remise à plat des réglementations sur les semences européennes (« Butter régulation » et sommet européen du gène) et la réunion du comité directeur du TIRPAA1 à Rome fin octobre.
Nicolas Sarkozy a surpris tout le
monde en demandant lors des
conclusions du Grenelle la suspension
des OGM pesticides. Cette déclaration
vient cependant confirmer plusieurs évolutions
récentes des positions :
LES « OGM CLANDESTINS » Le brevet sur le gène a le gros avantage pour les semenciers d’assurer la traçabilité de leur propriété intellectuelle jusque dans les champs et les filières où ils peuvent venir exiger leurs royalties, mais cette traçabilité s’affiche aussi dans l’assiette du consommateur européen qui n’en veut pas : ces OGM deviennent ainsi en Europe commercialement contre-productifs dès qu’ils se retrouvent étiquetés dans un produit alimentaire vendu au consommateur final. Ils restent cependant encore utilisables pour l’alimentation animale tant que le consommateur de produits animaux n’est pas informé de leur utilisation, ou pour les cultures industrielles (amidon, agrocarburants...), à condition qu’elles ne risquent pas de contaminer les cultures non OGM. (...) Les firmes n’ont pas pour autant abandonné leur volonté de confiscation de la semence : elles ont compris de longue date que le COV associé aux nouvelles biotech pouvait être pour cela encore plus efficace que le brevet. Dès 1991, l’UPOV2 faisait des « variétés essentiellement dérivées » et transformait la semence de ferme en contrefaçons illégales. Dès les premières directives européennes sur les OGM (1990 puis 2001), les nouvelles biotech ( mutagenèse, multiplication et fusion cellulaire...) ont été qualifiées de « méthodes de sélection traditionnelles », dont le produit n’est pas qualifié d’OGM et ne fait donc l’objet d’aucune obligation d’évaluation, d’autorisation spécifique pour la commercialisation ou la culture, ou d’information du consommateur. Quant aux nanotechnologies, elles n’ont à ce jour aucune existence juridique, ce qui permet de mettre les produits qui en sont issus sur le marché dans la plus totale confidentialité. LE COV CONTRE LE BREVET Ces techniques de modification artificielle du génome, auparavant très aléatoires, sont aujourd’hui devenues industrialisables grâce aux progrès de la « sélection assistée par marqueur ». C’est pourquoi les semenciers se démènent pour achever un cadre juridique protégeant leur développement, aussi efficace que le brevet mais sans ses inconvénients : le cumul du COV rénové sur la variété et du brevet sur le gène. Le brevet rend obligatoire l’information du public sur la méthode de sélection utilisée, c’est pourquoi il ne concerne en Europe que « le gène et sa fonction » et non la variété comme le brevet américain : il permet ainsi à l’obtenteur de se protéger de ceux de ses concurrents qui voudraient reproduire sa découverte, sans aucune obligation d’information du consommateur de la variété manipulée. Celle-ci est alors protégée par un COV qui n’exige pas cette information. La protection du COV se révèle cependant beaucoup moins efficace que la traçabilité du transgène dans le champ et les filières pour récupérer les royalties. Dès le printemps 2006, le lobby semencier s’est empressé de faire ratifier par le Parlement français les accords UPOV de 1991 faisant de la semence de ferme une contrefaçon. Malgré cela, il est extrêmement difficile pour un semencier de prouver que c’est sa variété, telle que définie dans le dépôt de COV par ses caractéri s t i q u es physiologiques et agronomiques, et non celle de son concurrent aux caractéristiques souvent assez proches, qui a été reproduite dans le champ du paysan auprès duquel « il doit récupérer des royalties s’il ne veut pas être victime de la concurrence déloyale des brevets sur les transgènes ». Les semenciers anglais, en bon libéraux, ont résolu ce problème grâce à un accord privé avec les trieurs à façon qui leur reversent ces royalties après les avoir inclues dans la facture de prestation payée par les agriculteurs. Mais cet accord reste inefficace lorsque l’agriculteur ne fait pas appel à une entreprise de triage. Fidèles aux traditions interventionnistes de leur pays, les semenciers français se sont appuyés sur l’Étatpour imposer par un accord interprofessionnel le prélèvement de ces royalties auprès de tous les agriculteurs livrant leur récolte de blé tendre à un organisme stockeur agréé et ne pouvant pas prouver qu’ils ont acheté des semences certifiées. Au printemps 2007, ils ont fait voter au Sénat une loi destinée à permettre l’extension de ces accords à toutes les espèces, mais ils n’ont pas réussi à l’imposer au Parlement. En plein Grenelle de l’environnement, ils ont cependant fait voter une loi supprimant toute possibilité d’exonérer les semences de ferme des poursuites concernant les contrefaçons. C’est ainsi que toutes les semences de ferme sont désormais susceptibles de poursuites en France, sauf celles qui s’acquittent de la Contribution Volontaire Obligatoire (CVO), ce qui devrait, selon les semenciers, inciter les agriculteurs à réclamer eux-mêmes le vote de la loi généralisant à toutes les espèces les accords interprofessionnels instaurant des CVO. (...) Dans le même temps, comme pour parer
aux faiblesses de la CVO, de nombreux
semenciers ou distributeurs développent
des pratiques d’intégration qui ne laissent
plus aucune liberté à l’agriculteur et n’offrent
aucune information au consommateur
autre que celle relevant de la publicité
commerciale :
Dans le même temps, l’UE a mis en place début 2007 un groupe de travail ayant pour mission de remettre à plat, de simplifier et d’alléger les coûts de l’ensemble des réglementations semences et catalogue (comme cela a été fait récemment pour la bio). Suite à une « large » consultation en janvier 2008, les premières conclusions seront présentées en juillet et les premières propositions de la commission doivent sortir en octobre, sous présidence française. L’ESA (organisation européenne des semenciers présidée par le Français Deprez) est déjà en ordre de bataille pour reprendre l’offensive contre les semences de ferme et remplacer les lourdeurs administratives de l’actuelle certification des semences par une « autocertification » agréée par les pouvoirs publics, validant les systèmes de contrôle internes déjà en place dans les seules grandes firmes, car inutiles et hors de portée des artisans semenciers. Le Traité International sur les Ressources
Phytogénétiques pour l’Agriculture et l’Alimentation
(TIRPAA), ratifié par 116 pays
dont l’UE mais pas les USA, et opérationnel
depuis seulement 2004, intègre dans la
gouvernance mondiale de la conservation
de la biodiversité deux nouvelles notions
amenées par la CDB4 (Rio 1991) : la souveraineté
des états sur leurs ressources
génétiques et le partage des avantages
issus de leur utilisation. Il s’est donné trois
objectifs principaux :
Guy Kastler, Réseau Semences paysannes |
|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
No Pasaran 21ter rue Voltaire 75011 Paris - Tél. 06 11 29 02 15 - nopasaran@samizdat.net Ce site est réalisé avec SPIP logiciel libre sous license GNU/GPL - Hébergé par Samizdat.net |