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1er juin - Les dindons ont dit stop à la farce (du capitalisme)


Date : Dimanche 1er juin 2003, 8 H 30. Lieu : Le Village Anticapitaliste Alternatif Anti Guerres, Annemasse (Haute-Savoie). Circonstance : Mobilisation contre le G8.
Une foule de plusieurs milliers de personnes se met doucement en marche vers la sortie du Village pour rejoindre l’immense cortège qui partira vers 10 heures sur la route de Thonon.




La veille, des militants de la CLAAAC G8 s’étaient réunis pour re-préciser les objectifs de la manif et distribuer les différentes tâches afférentes (maintien des banderoles en tête de cortège, ravitaillement en eau, diffusion de tracts, SO, collages, mégaphones…). L’objectif est clairement affirmé : il s’agit d’un défilé libertaire unitaire et pacifique, sans point de blocage, avec rencontre des compagnons suisses au niveau de la frontière. Question sécurité : une bonne partie du cortège sera ceinte de larges banderoles, rendant plus difficiles d’éventuelles intrusions et permettant aux manifestants de rester groupés. L’équipe médicale en profite pour informer chacun des protections élémentaires à observer contre nos ennemis potentiels de la journée : le soleil, les gaz lacrymogènes…

Nous commençons donc à battre le pavé avec comme banderole :
Contre les saigneurs du G8
Convergence des Luttes Anti Autoritaires et Anti Capitalistes.


A un carrefour, nous attendons pendant plus d’une heure le grand départ. Beaucoup ont un curieux tatouage sur le bras : il s’agit du numéro de la Legal Team. Au cas où… Quelques drapeaux CFDT sont sifflés. Le soleil commence à cogner. Ainsi que nos cordes vocales. Tout est à nous, rien n’est à eux, tout ce qu’ils ont ils l’ont volé ! Partage des richesses, partage du temps du travail ou sinon ça va péter ! No border ! No nation ! Stop the deportation ! El pueblo unido jamàs sera vincido ! Contre la misère et la précarité, grève générale illimitée !

Après quelques menus détails réglés, nous intégrons notre place dans le cortège. Et quelle place ! Devant nous se trouvent le personnel en grève, suivi des syndicats appelant à la grève générale (qu’ils disent !) puis des militants pour l’abolition de la dette des pays du Tiers Monde. Derrière nous se bousculent le personnel du VIG (Village Intergalactique qui comprend la LCR, ATTAC, …bref, ceux dorénavant nommés altermondialistes) et les partis politiques. Modestie mise à part, nous sommes le plus gros cortège de la manif. Le Monde, dans son édition du 2 juin, ira jusqu’à écrire : Outre la référence au contexte social, c’est surtout l’importance du bloc "rouge et noir" - celui des anarchistes - qui a fait la spécificité du défilé sur le tronçon français. Ce cortège "contre les saigneurs du G8" s’est avéré être l’un des plus imposants de la manifestation. Quelque 5 000 personnes ont ainsi défilé en son sein, scandant "Le capitalisme, c’est la guerre" [avec le sang du peuple, il trace les frontières ! ndla.] ou "Unité, action, autogestion".

Nous allons défiler ainsi jusqu’à la frontière. Situation ironique : les placards en bois censés protéger les vitrines des méchants casseurs vont servir de support à toute une logorrhée de tags et de collages à l’arrache. Sur le parcours, les caméras seront huées : Médias partout, info nulle part ! La présence policière française, et ce jusqu’à la fin du défilé, sera des plus discrète, laissant à son homologue helvète la primeur de la bastonnade et du serrage. A midi et quart, la Suisse, toutes frontières ouvertes, nous accueille. Petit raté : la jonction avec le cortège libertaire venant de Genève sera loupée. La mobilisation générale atteint à ce moment-là cent mille personnes et la synchronisation semble impossible à effectuer. Seule une poignée de personnes chichement masquées se joindra à nous et profitera de l’occase pour s’attaquer à une station BP. A partir de ce moment-là, nous effectuons une boucle qui nous ramènera vers la France. Malgré la chaleur écrasante et une ballade sur l’autoroute peu gratifiante, l’énergie des anars reste intacte. Tout au long de la marche, nos troupes seront stimulées par un camion sono qui alternera musique (les Bérus, Brel, Brassens…) et exhortations tapageuses. Nous nous offrons même un sacré beau moment quand, traversant une des banlieues d’Annemasse, nous fredonnons La Mauvaise Réputation : au village sans prétention…

Quand on n’invite pas les badauds à se joindre à nous : Cassez vos télés, descendez dans la rue !, on leur adresse des slogans sarcastiques : Travaillez, consommez, le G8 s’occupe du reste ! Quoi qu’il en soit, la population locale, malgré les incessantes campagnes de diffamation à notre égard, se montrera plutôt curieuse et intéressée. Il semblerait que nous ne soyons pas les sinistres jobards vendus par les médias.

Nous serons un peu retardés sur le retour par des négociations avec la flicaille qui avait eu la maligne idée d’asseoir ses troupes en amont sur notre passage. L’affaire sera réglée assez rapidement et la voie dégagée.

A 15h15, nous rejoignons le VAAAG. Les cuisines collectives nous avaient préparé la tambouille et la cervoise est prête à écumer dans les gobelets en plastique !


Si certains ont pu reprocher le côté traîne savate de la manif et une certaine rigidité organisationnelle, force est de constater que l’opération est un succès. Dans un contexte où la liberté de circulation est plus que jamais de mise, le franchissement libre de la frontière par des milliers de personnes nous a semblé être un symbole important. En outre, la liaison entre la lutte contre la mondialisation capitaliste et la mobilisation française contre la casse du service public et des retraites a été parfaitement réussie. Nous avons montré que, dans sa diversité, le mouvement libertaire pouvait, sur des thématiques majeures, s’unifier et s’organiser. Il semble qu’avec ce pari gagné, c’est autant une confiance inter-orgas qu’une crédibilité vis-à-vis de l’extérieur qui s’en sont trouvées grandies.

Flor & SeB


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