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Interview d’une militante du - Mouvement Français du Planning Familial
Moman, raconte-moi une histoire ! A
l’occasion de l’anniversaire de la loi Veil, retour sur le
mouvement féministe de l’époque à travers
cette entretien avec Monique, à l’époque militante
à la section havraise du Planning Familial et mère
d’une militante de No Pasaran !
NP : Quand et pourquoi es-tu
rentrée au planning ? Depuis quand existait-il au Havre
?
En 1973 ,après mes études
à Tours ,je suis revenue au Havre pour y travailler.
J’avais 22 ans ,et je
prenais la pilule * .
*la loi Neuwirth autorisant la
contraception a été votée en 1967,
incluait l’autorisation des parents pour les mineures et
la majorité était à 21 ans.
Il n’était pas de bon ton
d’avoir des relations sexuelles hors mariage et prendre
la pilule ça signifiait qu’on assumait une vie
sexuelle .
Comment se positionnait le planning
familial vis à vis de la mouvance du droit des femmes ?
Le Planning existait au Havre depuis les
années 56, et le débat concernant
l’avortement avait déjà eu lieu en son sein
;en 1973, le Planning national avait pris position et
était moteur de la lutte.
Qui participait au planning ?
Le groupe que j’ai rejoint alors
était constitué de femmes exclusivement (les
médecins hommes avaient pris des distances). Le
groupe était profondément éclectique :
femme de médecin, médecin, femme d’ouvrier,
jeunes profs, hôtelière
Les engagements étaient aussi
éclectiques : motivation humaniste
(protestants et francs-maçons avaient
été les initiateurs du Mouvement pour une
Parenté Responsable),motivation personnelle ,proches du
PC ,de la LCR ou autres divers gauche et extréme-gauche
,féministes avérées ou non .
Comment fonctionniez vous ?
Nous nous sommes co-formées afin
de répondre aux demandes des femmes, utilisant les
compétences des unes et des autres :sociologie et
pratique des dynamiques de groupe, connaissances
médicales, pratique psychologique,
expérience de
l’accueil des femmes des anciennes ,
graphisme etc
Nous avons ainsi fait de nos
diversités une force, travaillé nos
différences, et surtout nous nous frottions sans
arrêt aux réalités des femmes lors
des permanences et des réunions de groupe pour
les départs à l’étranger.
Nous travaillions toujours à 2 minimum dans ce
mode de co-formation permanente .
Et au niveau hexagonal ?
Le MFPF est toujours une
fédération nationale. Nous avions donc
des instances départementales et nationales.
Le groupe du Havre a
revendiqué sa particularité sur ses modes
de fonctionnement et de formation, et insensiblement
ses positions quant à la lutte des femmes,
marquant notre implication personnelle, notre propre
vécu de femme. Pas de hiérarchie dans le
groupe. Des représentantes aux instances qui
n’en avaient pas pour autant le pouvoir dans le
groupe (j’ai été ainsi membre du CA
national ).
Quelles étaient vos
relations avec les partis politiques de la ville ?
Comment réagissaient les gens à vos
actions ?
Nous fonctionnions avec nos
réseaux ,chacune ayant accès à
différentes familles qui pouvaient
être des partenaires au fil des
différentes actions.
Le moment fort fut le passage du
film Histoire d’A , qui était
alors interdit et emblématique : des groupes
très différents, voire opposés,
ont mis à notre disposition leurs moyens humains
ou logistiques afin que ce film arrive
jusqu’à nous (cache-cache rocambolesque
avec la police !), que la soirée de projection
ait lieu sans anicroche.
Cela a permis la création
d’un MLAC constitué de
représentant(e)s du Planning, des
différents groupes politiques, et d’
inorganisés .
Notre groupe était
plutôt bien perçu ,car nous avions une
vraie pratique avec les femmes et sans doute aussi
parce que nous échappions volontai
rement aux conflits partisans .Ce
qui nous animait était notre volonté de
changer cette loi et de changer quelque chose à
la condition des femmes parce que c’était
la notre !
Bien sûr on nous a
traitées de gouines , bien
sûr nous avons dû affirmer notre
légitimité à dire, et bien
sûr la bataille était sur tous les plans y
compris privés !
Y avait-il une réaction
spécifiquement masculine ?
Nous étions au cur
d’une problématique qui concerne notre
corps de femme et partant de notre existence
même. La situation des Murs alors
était d’une énorme scission entre
les sexes, mais cette scission avait commencé
à vaciller avec les Suffragettes du début
du siècle, le droit de vote pour les femmes et
les mutations sociologiques profondes de ce
siècle. Les filles arrivaient en nombre à
l’Université, les filles et fils
d’ouvriers aussi.
Devant l’avortement et la
contraception, certains hommes considéraient que
c’était à la fille de se
débrouiller, que de toute façon
c’était une pas grand-chose
puisqu’elle couchait ! ! !
Mais il y avait tout ceux qui
étaient en mouvement déjà avec ce
grand tumulte, et qui s’interrogeaient, avaient
à questionner leur engagement politique et leur
pratique.
Il y avait les hommes qui
aimaient leur compagne et la soutenaient
Il y avait des femmes
murées dans leurs convictions
Pourquoi as-tu quitté le
planning ? Que penses-tu du féminisme
actuellement ?
J’ai quitté le
planning après que la loi ait été
votée et appliquée ,dans les
années 80 parce que d’autres
investissements me paraissaient prédominants et
que mon temps devenait très compté avec
une profession de passion ,deux enfants à ne pas
trop rater.
Mais le groupe de copines a
continué de fonctionner sur un mode de
réseau ,mais aussi plus concrètement dans
la mise en place de stages pour des femmes souhaitant
(re)travailler, puis dans d’autres types
d’insertion sociale .
J’ai vécu
l’évolution de la place des femmes, la
constate dans ce que vivent mes nièces et fille,
il y a certainement encore à faire et à
vivre, je n’en ai pas fini et vous non plus !
Et qu’est-ce que
c’est bien de vouloir changer et faire changer !
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