Retour accueil

AccueilJournalNuméros parus en 2007N°62 - Octobre 2007EDUCATION - L’EMANCIPATION CONTRE LA SOUMISSION > LA FACULTÉ SUR LE MARCHÉ

Rechercher
>
thème
> pays
> ville

Les autres articles :


AUTONOMIE DES FACULTÉS

LA FACULTÉ SUR LE MARCHÉ


Sarko l’avait annoncé comme un de ses grands projets, la loi dite « d’autonomie des universités » est désormais chose faite. Elle transforme les facs en écoles supérieures plus ou moins privées, concurrentes entre elles avec sélection à l’entrée, rémunération libre des profs...


La concurrence entre les facs va forcément créer un enseignement supérieur à deux vitesses : d’un côté les universités à gros budget et/ou spécialisées dans un domaine précis, qui pourront se permettrent une sélection importante et formeront « l’élite » des étudiants du pays. De l’autre, des facs modestes qui verront de fait leurs diplômes se dévaloriser. La mission d’insertion professionnelle « implique de mener une réflexion sur le contenu des enseignements dispensés et la professionnalisation des premiers cycles universitaires », par la « création et fermeture des filières en fonction des besoins ». Le texte ne précise pas comment seront définis ces besoins. Mais, la rentabilité à court terme étant mise en avant, et le président d’université devant boucler son budget tant bien que mal, on peut raisonnablement penser que ce seront les filières jugées « non rentables » sur le court terme sur lesquelles seront faites les principales économies, voire qui seront purement et simplement supprimées. La professionnalisation va aussi accentuer les inégalités entre étudiants : les étudiants d’universités moins « cotées » auront beaucoup plus de difficultés à trouver des lieux d’accueil.

Par ailleurs, la volonté affichée par le ministère et certains présidents d’universités d’attirer de meilleurs enseignants par la possibilité de leur offrir un salaire plus élevé, risque de créer une inégalité entre ceux-ci et les autres enseignants. De plus, la question du financement de ces salaires est posée : à qui prendra-t-on cet argent supplémentaire ?

De même, la recherche universitaire, dans laquelle le gouvernement affiche de placer les universités françaises aux premières places, intéressera celles-ci du moment qu’elle soit rentable. Les frais engagés pour attirer des chercheurs notoires devront être économisés ailleurs. Dans ce contexte, où les dépenses publiques sont la cible d’attaques incessantes, comme la suppression de 10 000 postes dans l’Éducation Nationale, comment peut-on espérer que les universités seront épargnées par cette casse systématique ?

En dehors des stages, les étudiants sont nombreux à être déjà dans un processus de professionnalisation. Beaucoup sont en effet obligés de travailler pour financer leur cursus. Et plutôt que de garantir un revenu étudiant permettant à chacun de se consacrer à ses études, cette loi renforce encore les inégalités en permettant aux universités de proposer des « emplois étudiants », soumis à critères sociaux. En gros, ça renforce encore le principe, y compris au sein des facs, moins tu as d’argent pour financer tes études, moins tu as de temps pour étudier.

L’université est donc transformée en entreprise, avec la nécessité de trouver des fonds importants pour se financer : hausse des droits d’inscription, des services (RU, accès aux BU...), entrée de capitaux privés qui chercheront à rentabiliser leurs investissements (merci les stages obligatoires non rémunérés !), fermeture de filières non rentables, abandon de certaines recherches universitaires...

Finalement, on assiste sans trop réagir à la remise en cause du principe et du but de la formation universitaire : apprendre, se former, s’ouvrir intellectuellement et culturellement. L’objectif de cette politique est clair : si tu vas à la fac, c’est pour apprendre un métier, pas pour glander (sic).

C’est un peu le même principe que la criminalisation des chômeurs et précaires depuis plusieurs années : l’étudiant est un poids mort pour la société, l’université n’est pas rentable, il faut la rendre financièrement viable. On n’est plus dans une logique de service public d’enseignement, mais dans une logique financière globale où l’enseignement doit apporter non plus une valeur ajoutée humaine à la société, mais de l’argent, et rapidement si possible !

C’est finalement dans la droite (dure et décomplexée) ligne politique actuelle, et ça nous fait encore une raison de plus d’être persuadé que, vraiment, on se fout de notre gueule !


No Pasaran 21ter rue Voltaire 75011 Paris - Tél. 06 11 29 02 15 - nopasaran@samizdat.net
Ce site est réalisé avec SPIP logiciel libre sous license GNU/GPL - Hébergé par Samizdat.net