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AccueilJournalNuméros parus en 2007N°58 - Avril-mai 2007 > SANS-PAPIERS À ROUEN : BILAN D’UNE OCCUPATION

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SANS-PAPIERS À ROUEN : BILAN D’UNE OCCUPATION


Depuis le 6 juin 2006, l’Eglise Saint-Sever de Rouen est occupé par le collectif des sans-papiers de l’agglomération rouennaise. A l’heure où il s’apprête à quitter le lieu, voici un petit bilan.


Pourquoi avoir occupé ?
Au mois de juin, la lutte des sans papiers s’enlisait. Pour se donner de la visibilité, le collectif des sans-papiers décide alors d’occuper l’Eglise Saint-Sever avec l’accord de l’Evêché. Les sans-papiers disposent dès lors d’un lieu pour se réunir et se donne les moyens d’établir un rapport de force avec la préfecture.

Comment s’est organisée la lutte pendant ces 10 mois ?
Le rythme de lutte est soutenu. Tout d’abord, une réunion hebdomadaire avec les soutiens et une AG des sans-papiers toutes les semaines qui permet le partage des informations et la prise de décision. Les rassemblements sont également bi-hebdomadaires :rassemblement devant la préfecture le mercredi, rassemblement devant l’Eglise Saint- Sever le samedi, suivi parfois d’une manifestation dans le centre-ville de Rouen. A cela se sont ajoutés plusieurs séances de parrainage « citoyen » (cad devant les élus de l’agglomération rouennaise) ou symbolique. Le bilan de ce mode de fonctionnement est mitigé. Tout d’abord, l’occupation n’a vécu que par le surinvestissement de certains.Peu de sans-papiers et encore moins de soutiens sont présents hors des moments de réunion et en particulier la nuit, ce qui a mené le bureau à soumettre l’inscription au collectif des sans-papiers à leur participation à l’occupation et aux diverses actions. De plus, si dans les premiers mois de l’occupation, la présence des soutiens étaient massives et les sans-papiers étaient nombreux, la dynamique s’est peu à peu essoufflée. Les dernières « grosses » manifestations regroupaient à peine 150 personnes. De fait, même si l’on peut le déplorer, il semble que les parrainages soient la plus grande réussite de ces dix derniers mois. Selon les sans-papiers, le parrainage n’a pas été simplement symbolique : les « parrains » ont véritablement soutenus les sans-papiers qu’ils parrainaient, notamment en les accompagnant en préfecture, en leur fournissant une adresse administrative, etc. Le constat est simple : il est difficile de mobiliser sur le thème de la régularisation de tous les sans-papiers, alors que les individus sont prêts à agir pour des personnes parce qu’ils les connaissent ou qu’elles ont une histoire particulière. Le succès de RESF l’a bien montré. Difficile dans ce contexte de sortir de la logique du « cas par cas » !

Quelles relations avec la préfecture ?
Au début de l’occupation, les sans-papiers avaient obtenu une audience avec le préfet. Au milieu de l’été, tout était à refaire car le préfet changeait. Le 13 septembre, le collectif obtient un rendez-vous avec le nouveau préfet : refus de toute régularisation massive, mais divers engagements sont pris. Et bien sûr ils n’ont pas été tenus. Une liste de 156 sans papiers a été déposée. Les dossiers sont examinés lors d’audience à la préfecture en présence de membre du bureau des sans-papiers et de soutiens. Sur 60 dossiers examinés à ce jour, 13 sans papiers ont été régularisés lors des audiences et 3 hors audience, 9 ont été rejetés définitivement. La préfecture fait traîner les dossiers et les audiences se soldent de plus en plus par de simples avis à confirmer par la suite. Le collectif déplore notamment que de nombreux dossiers qui bénéficiaient d’un avis favorable à l’issue de l’audience soient ensuite rejetés définitivement et on imagine aisément l’impact psychologique sur le sans-papiers qui se croit enfin sorti de cette galère pour y retomber aussitôt. Le collectif s’inquiète en particulier de la situation des célibataires et des couples sans enfant dont les dossiers sont automatiquement rejetés. Il souligne aussi que le préfet n’a jamais utilisé la dérogation à titre humanitaire, seul possibilité d’être régularisé pour de nombreux sans papiers. En outre, il y a eu 13 arrestations depuis le début de la mobilisation dont 4 se sont soldés par des expulsions. La majorité était due à des contrôles au faciès.

Au final, l’espoir s’amenuise, la mobilisation s’épuise.Dans une semaine, le collectif quitte la sacristie après l’avoir repeinte pour remercier le prêtre qui les a accueillis. Ils vont reprendre des forces pour continuer le combat après les élections, en souhaitant n’avoir en face d’eux ni « Le Pen l’original et Sarkozy la copie » !

Virginie


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