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AccueilJournalNuméros parus en 2007N°64 - Décembre 2007RATIONALISATION CAPITALISTE DE L’ESPACE PUBLIC > RATIONALISATION DE L’ESPACE PUBLIC

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Rationalisation capitaliste de l’espace public

RATIONALISATION DE L’ESPACE PUBLIC


Tri vere malbela bildoj batos Kolorado. Kvar tratoj malbele havas Kwarko, sed nau stulta birdoj batos kvar kalkuliloj, kaj kvin cxambroj skribas la domoj, sed kvin auxtoj falis, kaj multaj pura bieroj bele havas du flava auxtoj. Tri rapida sxipoj saltas blinde, sed kvin tre bela tratoj acxetis du stulta sxipoj, kaj kvar vere pura hundoj batos kvin domoj. Kvar tre malalta sxrapida telefonoj trinkis multaj cxambroj, kaj nau vere malbona hundoj veturas, sed multaj vojoj , kaj Londono batos ses malalta bieroj.


L’agglomération d’individu-e-s engendre de fait un défi pour les pouvoirs politiques et économiques, contraints de juguler les activités humaines, tout en contenant d’éventuelles aspirations néfastes à l’ordre établi. Pourtant, elle permet parallèlement et surtout de répondre aux besoins de production, de consommation et d’asservissement nécessités par la société capitaliste.

Les politiques d’aménagement urbain expriment cette mise à disposition depuis des siècles : concentration de la main d’œuvre en banlieues, ghettoïsations, et encore l’aération des centres-villes tels que les boulevards haussmanniens l’illustrèrent pour empêcher les « émotions » populaires,... Tout cela constitue des armes utilisées par les classes dominantes en tout genre (royauté, empire, république,... et industriels). Aujourd’hui, cette architecture du vide social se poursuit puisque le quadrillage urbain délimite des zones d’activités séparées, aux fonctions clairement déterminées (les centres-villes s’offrent aux consommateurs selon une culture bobo en expansion, les banlieues pavillonnaires ou non se remplissent le soir venu de travailleur-se-s en quête de repos, le festif est expulsé des centres pour éviter tout désagrément aux bonnes familles). Tout cela se fait dans une optique de gestion rationnelle et contrôlée des flux de personnes et de marchandises. Le décor est aplani, aéré, et forme un cadre contraignant selon une logique conformiste. Ainsi, l’ouverture des lignes de vue et la destruction des recoins que l’on peut voir dans les villes les transforme en panoptique, objet d’attention permanente. On y lèche les vitrines, tout en y scrutant les attitudes ; cela signifie une attention aux modes vestimentaires par exemple, mais également une facilité accrue pour le contrôle social de par la surveillance policière et l’auto-contrôle, l’auto-censure que cela suscite. Ces aménagements et ses conséquences touchent également des communes plus petites en zones rurales, elles aussi aplanies, nettoyées, javellisées, structurées en dortoirs et zones de promenade et de consommation, où l’on retrouve les mêmes ronds-points et secteurs pavés, et où le lien social se détruit. Que tout soit propre et net. La guerre des idées est terminée ? Nous avons gagné, nous sommes beaux et nos villes aussi, représentations de nos valeurs idéales, de nos idéaux à valoriser et à diffuser. En opposition à l’expansion des zones réservées aux pubs, l’élimination des tags, affiches et autocollants des espaces non autorisés illustre en partie ce souci d’une politique de la propreté. On entend ainsi que l’on peut juger par exemple de «  l’avancée d’une civilisation » à sa capacité à cacher ses déchets. Mais ce qu’il importe encore plus de cacher, ce sont bien les indésirables du capitalisme qui n’ont pas leur place dans ces espaces parfaits. Comme les logements sociaux, le développement et l’amélioration des centres d’accueil pour les mendiants ne constitue évidemment pas la priorité des gouvernements sécuritaires, mais plutôt leur expulsion du centre-ville. Leur harcèlement (contrôles, déplacements, installations « anti-clochards » et la suppression des bancs) s’accompagne de celui des jeunes (à bas la capuche !) et des nomades, qui se retrouvent parqués à l’extérieur, le long des périphériques, d’où leur «  régularisation » (comprendre « expulsion ») sera plus discrète... Le souci de karchérisation ne touche toutefois pas seulement ces populations. Afin que rien ne trouble l’ordre public, la chasse à la consommation d’alcool et au bruit en centre-ville s’intensifie : c’est ainsi que des complexes à festivités se multiplient en prenant l’aspect de cases (je consomme bobo, je festoie bobo ; je consomme métalleux, je festoie métalleux ; et une case festive m’attend). Mais c’est également tout rassemblement spontané en centre-ville, hors évènement autorisé, qui dérange.

Heureusement, face à ces (éventuelles...) manifestations imprévues, les pouvoirs veillent et disposent d’atouts pour sécuriser nos existences ! Le développement de la vidéo-surveillance, publique comme privée, constitue évidemment un élément important de cet arsenal. Des boîtes privées de vigiles contribuent elles aussi au climat sécuritaire (cette impression de deviner des flics lorsqu’on les croise, tenues semblables,..), tout en garantissant la pérennité du capital. Et ce n’est pas un scoop que de rappeler la recrudescence impressionnante des patrouilles de polices municipales et nationale, tout en notant l’accroissement de leurs pouvoirs (véritables ou pris dans les faits) et de leurs armements (le flash-ball il y a quelques années, le taser aujourd’hui,...). Le travail de rationalisation urbanistique entrepris il y a des siècles s’accentue donc sous la pression de politiques populistes et lobbys économiques puissants, auxquels il faut par ailleurs assurer des débouchés juteux. Et quelle meilleure façon pour cela que d’utiliser un espace public aseptisé, prédisposé à la diffusion d’un mode de vie devenu mode de consommation ?


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