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AccueilJournalNuméros parus en 2007N°64 - Décembre 2007RATIONALISATION CAPITALISTE DE L’ESPACE PUBLIC > Le Venise de l’Ouest

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Rationalisation capitaliste de l’espace public

Le Venise de l’Ouest


Pour illustrer ce phénomène et faire écho à la ballade de Doudou, je vous propose une petite incursion dans l’univers bobo nantais. Au menu : réhabilitation des faubourgs ouvriers en lofts d’architectes, construction de super-galeries marchandes de périphérie, rénovation des bâtiments historiques et monuments tels que le château en centre-ville, refondation du coeur de l’ïle Beaulieu en un centre financier et administratif.


L’idée est simple : donner un « troisième souffle » à Nantes, après le commerce triangulaire, après le goudronnage des rivières pour laisser passer les bagnoles, voici venu le temps de la réconciliation de Nantes et de ses eaux, car au XXIème siècle les berges, ça fait vendre des chambres d’hôtel. Qu’est-ce-que cela implique concrètement :
- plan de reconversion d’immeubles en surfaces commerciales (21000 m2 sont déjà en chantier, et la place Gloriette, soit 2000 m2, sur laquelle se déroule l’un des plus gros marchés populaires de Nantes ne saurait résister à cette pression).
- réhabilitation de l’île Beaulieu (barres d’immeubles des années 70), devenue (par la grâce du marketing) « Ile de Nantes », ainsi que des bords de Loire, en : zones d’habitation avec duplex et terrasses, bureaux, promenades bétonnées sur le site des anciens chantiers navals.
- transformation d’anciens entrepôts industriels en cubes à festivités découpés en boxes à thèmes. Ainsi, dans ce « placard à bananes » (car ce lieu s’appelle « hangar à bananes ») se concentrent quelques dizaines de bars, restaurants, boîtes de nuits, classés par « style » (entendre par là « couleur de l’emballage » : underground , VIP , techno , exotique , etc...)
- friches industrielles muséographiées.

C’est comme ça que l’usine Lu est devenu un retsaurant-bar branché flanqué d’une salle de spectacle Contempoôrain (et d’une librairie où les livres sont présentés derrière des grillages), que les anciens entrepôts citroën de Mangin vont être transformés en parc sous serre, et que la trocante (ancien entrepôt) est devenu le parc-phare des expositions payantes de l’industrie culturelle nantaise, où l’on peut fréquemment croiser un éléphant automobile en carton-pâte suivi par des hordes d’admirateurs brandissant leurs portables-appareil photo en signe de soumission.

Nantes-Métropole, pour asseoir sa notoriété et attirer les investisseurs, n’a pas manqué de se faire mousser, notament dans l’Express, au sujet de la qualité de vie nantaise. Et pour vérifier, les touristes et les autochtones ont pu s’offrir un aller-retour dans la mégalopole-fantôme Nantes-SaintNazaire lors de la première biennale d’art contemporain (comme ils se la pètent !) intitulée « Estuaire 2007 ». Cette petite divagation mégalomane de NANtes-Métropole, Total Fina, et Jean Blaise (euh... apparement un artiste), a coûté pas moins de 1,4 millions d’euros, a fait un flop, mais tant pis, les gens avaient déjà payé leurs tickets. S’en est suivi la coupe du monde de rugby, durant laquelle Nantes a accueilli deux matches, la bière a coulé à flots, mais n’a pas su faire taire la colère des barmans du centre-ville en passe de se faire radier de la carte, car leurs activités dérangent les vieilles rombières (bruits, état d’ébriété de la jeune clientèle, pollution des trottoirs de marbre). Et enfin, le mondial de handball féminin se tiendra en grande partie à Nantes.

Le pari est gagné, les gros sous sont au rendez-vous, pour preuve, depuis prêt d’un an, pas moins de 7 pages de publicité ont été vendu chaque mois aux promoteurs immobiliers dans Nantes-passion (le journal de Jean-Marc Ayrault).


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