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> N°64 - Décembre 2007
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Actualité des luttesQUAND LA GAUCHE DERAILLE, LE PEUPLE TRINQUECheminot-es, étudiant-es, lycéen-nes...Pendant plusieurs semaines l’hexagone a été secoué de mouvements de protestations, de grèves, d’actions, de manifestations de la part des cheminots, des étudiants, des lycéens, des avocats... Et pourtant le gouvernement ne semble pas acculé à faire de grandes concessions. Se servant du sécuritaire pour affirmer son pouvoir autoritaire, il ne trouve en face de lui aucune opposition politique ou syndicale suffisante capable de faire échouer ses réformes libérales, et à terme la disparition du service public.
La mobilisation engagée sur la réforme des régimes spéciaux le mardi 13 novembre avait de quoi faire plaisir. Unité syndicale et un des taux de grévistes les plus importants de ces 20 dernières années, mieux qu’en 95 disaient certains pouvaient laisser penser que c’était bien parti. Mais ceci cachait une grande différence d’avec le conflit précédent. En effet, la CGT, depuis 12 ans, a perdu de sa combativité ; pas les militants de la base ; mais au sommet où officie Bernard Thibault. Ce dernier les jours précédents le conflit, avait fait les yeux de Chimène au gouvernement en appelant de ses voeux des tables rondes tripartites pour que s’engage de réelles négociations et surtout ne faisant pas du retrait des 40 annuités un préalable. Du coup, et avec un tapage médiatique encore plus impressionnant que d’habitude - prises d’otages, les nantis, embouteillages monstres, etc.- les salarié-e-s en grève de la RATP et de la SNCF se retrouvaient très esseulé-e-s dans leur combat, ne pouvant compter sur une généralisation du conflit sur des mots d’ordre touchant à la fois les retraites, mais aussi par exemple la question des franchises médicales. Le mardi 20 novembre lors de la manifestation de la Fonction publique, la jonction avec la lutte des cheminots s’est faite sous les applaudissements, mais c’est dans peu de villes que ces derniers ouvraient le cortège des manifestations, laissant place aux banderollessyndicales unitaires sur le pouvoir d’achat. Et ce, dans le même temps où les étudiants et les lycéens,en lutte depuis quelques semaines, faisaient entendre leur voix. Mais à la différence du CPE (contrat précaire emploi) en 2005, les syndicats de salariés les soutenait sans en faire trop. Quand à l’UNEF, en dehors des ses magouilles habituelles lors des mandatements au coordination, elle finissait même par se réjouir des miettes donnés par la Ministre Pécresse lors de leur rencontre au Ministère pour en appeler à l’arrêt des occupations. CGT ET UNEF : LES NOUVEAUX SERVITEURS DE SARKOZY... Dans les deux cas, ces syndicats ont joué contre leur propre camp. Les grévistes doivent affronter un pouvoir sarkozyste, qui fait de l’écrasement des dernières conquêtes sociales issues de la Résistance et des luttes des années soixante son cheval de bataille. Tout cela pour conduire la France dans le rang des nations civilisées où le libéralisme et la marchandise règne en maître. Mais c’est aussi toute une fraction de la gauche, qui, quand elle n’est pas entrée au gouvernement n’a aucune intention de faire échec aux mesures tant demandées par le MEDEF. La CGT le mardi 20 novembre dans le conflit de la SNCF casse l’unité syndicale et s’acquoquine avec la CGC, l’UNSA et la CFTC, laissant SUD-Rail et FO seules, pour en appeler à l’arrêt de la grève - le mot suspension étant un doux euphémisme pour dire que l’on arrête. A la base, tant chez les cheminots, qu’à la
RATP ou chez les étudiants et les lycéens, le
constat est amer de voir ainsi des mobilisations
en cours être torpillés par ceux là-mêmes qui
se disent être les porte-voix des milieux populaires.
C’est assez incroyable que les discours
sur les usagers - clients - exaspérés par la
grève et que l’équité c’est d’être exploité 40 ans
Pour les universités, mêmes causes, mêmes effets. Depuis 20 ans, sous la droite et la gauche la libéralisation de l’enseignement et son intégration aux demandes économiques sont devenus le leitmotiv du MEDEF et des gouvernements. Lors du vote de la loi en catimini cet été, l’UNEF se plaignait, non du fond de la loi, mais du fait qu’il y aurait moins de sièges au Conseil d’administration pour les étudiants et donc moins de représentants. Eh oui, comment faire fonctionner ces machines bureaucratiques si on ne leur donne pas du carburant. A quoi vont-elles servir si elles ne sont plus là pour faire les tampons et les médiateurs ? Ils ont obtenu satisfaction, on a remonté leur quota. Mais malgré tout ces petits arrangements ça coince. CONTRE LA CONFLICTUALITÉ SOCIALE, L’ETAT POLICIER Dans le cas des confits sociaux - cheminots et RATP-, l’Etat n’a pas employé la force, sachant qu’une partie des syndicats allait s’employer à faire cesser le mouvement, il a attendu sagement. Pour autant, toute action, qui sortirait du cadre légal mériterait une sanction exemplaire et sera traité comme un acte criminel. C’est ainsi que les dommages créés sur des fils électriques sur plusieurs lignes TGV font l’état d’une enquête policière poussée et si les auteurs sont retrouvées les mèneront au Tribunal. On peut aussi estimer que si la base n’est pas satisfaite des négociations et reprend le chemin de la lutte avec des piquets de grève et des occupations de voies, la réponse soit plus musclée. C’est surtout pour les étudiants et les lycéens que la réponse de l’Etat s’est faite par des interventions nombreuses des forces de police, près d’une quarantaine. Ce qui est à noter c’est qu’entre les fermetures administratives et l’intervention des forces de l’ordre pour empêcher d’occuper les locaux, les grévistes n’avaient plus d’espaces pour se réunir, discuter, envisager et construire leur action. Les occupations (présidence d’université, rectorats...), ont été d’ailleurs réprimé beaucoup plus violemment et rapidement à la différence de nombreux conflits antécédents où ces dernières se faisaient d’une manière assez tranquille. Pour les lycées, nombre de proviseurs ont empêché les grévistes de pouvoir se réunir. Dans une dizaines de cas, les anti-blocus, aidés de professeurs ont repris de force les lycées ou des facultés ; la violence de leur part étant justifié par le fait que la liberté d’étudier n’était pas respectée... Mais ce qui est le plus caractéristique est l’emploi des BAC (Brigade anti-criminalité) pour gérer les conflits avec les jeunes. Depuis le CPE, cette unité de police est de plus en plus sur le terrain social pour intervenir et jouer les gros bras d’une police politique. Mettant en place une stratégie de tension avec les manifestants les plus déterminés, elles menacent, intimident, désignent des individus et se comporte plus en une milice que comme une force de police ayant pour fonction le maintien de l’ordre. C’est à Nantes qu’est arrivé ce que l’on pouvait craindre depuis plusieurs années. Lors d’une action au rectorat le mardi 27 novembre, où près de 1000 jeunes étaient rentrés dans le parc avant d’être repoussés vers l’extérieur, un jeune lycéen de 17 ans a été touché par un tir de flash ball à l’oeil. Une enquête est en cours pour déterminer les faits mais rien ne justifie une telle agression ; Les mises en garde répétées aux syndicats d’enseignants et de salariés sur le fait que le comportement des BAC allait finir par poser un grave problème n’avaient eu jusqu’alors aucun écho. L’appel pour que dans les manifs, des militants syndicaux soient là pour les protéger des agissements de cette unité était resté lettre morte. Le fait que les BAC soient devenus les principaux opérateurs d’intervention laisse entendre que les mouvements sociaux sont analysés et traités par le pouvoir comme l’est la délinquance des quartiers. Et on a vu à Villiers-le-Bel ce qu’il en était de traiter les jeunes comme des “moins que rien” ; après l’accident tragique où deux jeunes ont été tués par une voiture de police la flambée de violence a été encore plus loin que lors des émeutes de 2005 avec l’emploi d’armes à feu. La relégation dans les quartiers de populations sans droit, subissant l’apartheid social, discriminations et mauvais traitements de la part de la BAC conduit et conduira inéxorablement vers des situations d’affrontements de plus en plus violents. Et le pouvoir sarkozyste surfera sur cette terreur et cette peur. En refusant de prendre en compte la question sociale et en disant vouloir mettre à bas la “voyoucratie”, Mr Sarkozy défend bien l’idée d’un pouvoir qui s’appuie sur le sécuritaire pour mettre au pas les prolétaires. En utilisant les BAC, en empêchant les jeunes de pouvoir mener leur lutte (fermetures administratives, action des anti-blocus...), le pouvoir laisse entendre que face à la conflictualité sociale, l’Etat répond et répondra par l’emploi de la force policière. L’UNEF en se rangeant au côté du pouvoir, de fait, accepte cette nouvelle gestion des conflits et s’intègre totalement dans cette idée que la grève ( et tout ses atours) n’est plus un des outils principaux de la lutte, et que dorénavant c’est la médiation, la co-gestion à l’instar de la CFDT qui prime. Au-delà c’est bien toute la question de la visibilité des luttes dans l’espace public qui est posé. En effet, comme on le sait déjà avec les “camions poubelles” qui passent juste après les manifs pour ramasser tous les tracts traînant sur la voie publique, la volonté de gommer toutes les aspérités dû aux conflits sociaux - manifs, occupations, actions...- renvoient à l’idée qu’il ne s’est rien passé comme dans le roman d’Orwel 1984 ; ceux qui s’opposent devenant des délinquants d’où l’emploi de la BAC, des attardés politiques, pour qui la lutte -des classes- reste un socle à la fois d’analyse et de pratiques sociales. QUELLE STRATÉGIE AUTONOME CONSTRUIRE ? Il est certain que nous devons reconstruire reconstruire des liens et des espaces comme le déclare des militant-e-s du “Forum syndicalisme et de classe et de masse”(1). Et ceci doit se faire par une interpellation de l’ensemble des militant-e-s syndicaux - CNT, SUD, CGT*...- en prenant appui sur la volonté à la base d’unité et de travail en commun, sur un développement lors des luttes de Comité de grève/lutte qui ne soit pas des intersyndicales où tout est réglé comme du papier à musique par les directions syndicales ; Ace sujet les étudiants ont démontré lors de leur mouvement toute la force d’une unité d’action et la capacité des coordinations nationales à pouvoir autoorganiser et autogérer leur lutte, même si tout n’est pas parfait bien sûr. (Nous reviendrons dans un prochain numéro sur ce sujet). Ce qui est sûr c’est que la révolte gronde et que les milieux populaires, s’ils veulent obtenir gain de cause, n’ont rien à attendre des partis politiques de gauche et des syndicats co-gestionnaires. Les quelques expériences de comités de grèves, de groupes unitaires à la base, d’espaces de lutte conviviaux doivent nourrir les discussions de celles et ceux qui défendent un service public socialisé ; Nous devons développer des transversalités entre syndiquée- s et non syndiqué-e-s pour que se constitue des collectifs pour un Front social anticapitaliste capables d’être actif dans les prochaines grèves. Le combat ne fait que continuer... Laurent (1) DEUXIÈME FORUM DU SYNDICALISME DE CLASSE ET DE MASSE SAMEDI 12 JANVIER 2008, de 9 h 30 à 18 h Paris XIe, grande salle du CICP, 21 ter rue Voltaire Alors que l’offensive générale de Sarkozy ne fait que commencer, il y a urgence à renouer avec les méthodes gagnantes du syndicalisme de classe et de masse : — clarté des revendications contre la prétendue “ négociation ” des reculs sociaux ; — grève dure contre la tactique des “ journées d’action ” sans lendemain ; — Assemblées générales intercatégorielles de site, élection de comités de grève révocables et leur coordination à tous les niveaux ; — combat pour la convergence des luttes et pour la grève interprofessionnelle, qui passe par la liaison des travailleurs des différentes catégories et des différents secteurs, contre l’isolement service par service, entreprise par entreprise, catégorie par catégorie. Nous appelons à amplifier les efforts en vue de regrouper les militants de lutte de classe dans les différents syndicats, pour combattre ensemble la ligne de la collaboration de classe et de la trahison des luttes, pour reconstruire le syndicalisme de classe. Contact : courantintersyndical@free.fr 2) Comme nous pouvons le voir dans ce courrier la ligne cogestionnaire fait des remous... CGT PSA, Mulhouse, le 16 novembre 2007 Cher Camarade, Nous n’avons pas du tout apprécié ta proposition au gouvernement de négocier les retraites des régimes spéciaux, régime par régime ou entreprise par entreprise.Quand on engage un combat comme toute la CGT l’a engagé pour la défense des régimes spéciaux de retraite et que ce combat a des conséquences pour la protection du régime général que Sarkozy veut remettre en cause en 2008, on se donne les moyens de le gagner et on ne divise pas les travailleurs en lutte dès la première minute comme tu l’as fait.Quand la grève est massivement suivie comme à la SNCF, la RATP ou à l’EDF, on essaie d’abord de créer et de renforcer le rapport de force et pas d’affaiblir ses propres troupes en les divisant avant de négocier sur le terrain de l’adversaire. Ton attitude nous rappelle malheureusement celle de la CFDT en 1995. On sait ce qu’il en a résulté ! Nous peinons tous les jours à gagner la confiance des travailleurs dans le syndicalisme et la CGT. Tu viens de démolir, par ton intervention, des efforts de mois et d’années. Nous essayons, bien souvent à contre courant, de lutter contre les préjugés sur les fonctionnaires et de militer pour la solidarité et la convergence des luttes du privé et du public pour un retour à 37,5 annuités. Tu viens de saboter cet effort. Nous espérons que les grévistes de la SNCF, de la RATP et de EDF, que les militants CGT de ces secteurs auront la force de continuer et de gagner malgré toi et nous leur envoyons toute notre solidarité dans leur combat. |
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