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AccueilJournalNuméros parus en 2001N°4 - Décembre 2001 > AZF : totalement irresponsable

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Débat national sur les risques industriels ou débat planétaire sur la sécurité de toutes les populations ?

AZF : totalement irresponsable


Avec l’explosion toulousaine d’AZF, catastrophe industrielle majeure, sinistre 2I septembre 200l, le débat de fond d’intérêt général qu’une partie de la population tente de soulever depuis de nombreuses années est passé au devant de la scène médiatique.


Anticipant la réaction de l’opinion publique le gouvernement Jospin organise une pseudo-consultation populaire, 27 débats régionaux dont l’avant dernier à Toulouse le 30 octobre. En fin de compte, c’est des mesures de prévention des risques industriels au niveau organisationnel, réglementaire et législatif (Sévéso III ou Toulouse1) qui seront mis en place. Il s’agit pour le gouvernement de faire accepter à la société la dure réalité des catastrophes majeures seulement en termes de risques et de sécurité industrielle. C’est une culture du risque propagée par un futur Ministère de la peur image 315 x 210 qui est proposée aux français. La finalité de la production et le coût de la vie ne sont toujours pas pris en compte. Quant au sort des toulousains, intimement lié au sort de l’ONIA, cet Eldorado chimique au cœur de la ville, il reposerai en définitive sur une décision arbitraire prise en haut lieu dans la capitale, à Matignon vers le 11 décembre 2001.

Rien n’est encore joué

Devant l’abandon des sinistrés livrés aux spéculateurs et au froid, devant les risques potentiels de nouvelle catastrophe, il paraît déplacé d’accepter un quelconque dialogue qui ne prendrait pas en compte l’ensemble du processus de vie, qui ne mettrait pas en préalable la sécurité de la population dans sa totalité, ici et ailleurs. Il serait indécent, impensable de palabrer avec un gouvernement qui veut nous imposer sa décision dictée par de sombres enjeux politico-économiques. En préambule à toute consultation et en gage d’apaisement, c’est la fermeture définitive du site, sa décontamination et sa reconversion ainsi que celle des salariés qui s’imposent comme symbole de changement fondamental. Car c’est bien d’un débat de fond dont il s’agit, un vieux débat de société sur l’avenir de ce monde.
Un débat qui a déjà commencé, au fil des luttes sociales d’émancipation, sous diverses formes, au travers de diverses organisations humaines horizontales, forces de proposition comme le mouvement antinucléaire qui revendique depuis trop longtemps une orientation démocratique de la politique énergétique nationale, ou comme le refus des OGM qui porte la volonté d’une autre agriculture en accord avec le vivant... Nous sommes de plus en plus nombreux à vouloir prendre le temps de réfléchir pour infléchir rapidement sur l’évolution désastreuse de ce monde industriel à visée marchande.

Nous savons pertinemment que ce débat ne peut se faire à la va-vite, entre deux échéances électorales combles de promesses (comme la sécurité), en excluant la population, principale concernée.
Nous avons le temps, le temps des années déjà écoulés à crier sans se faire entendre et le temps des années à venir qui vont transformer l’ensemble de la marche industrielle, qui vont chambouler les règles de ce monde barbare et définir enfin la notion de progrès. Nous avons le temps pour débattre, mais la survie de la planète et de l’Humanité est une urgence.
Il s’agit aujourd’hui de balayer définitivement le mythe d’une science sacralisée et salvatrice qui découpe la vie en grands principes, en lois et maintenant en brevets. Il s’agit de penser la science comme un outil et non comme une fin en soi ou une religion et de revoir à l’échelle humaine les applications technologiques sources de bien-être. Il s’agit de ne pas laisser s’achever le désastre de la société nécro-industrielle source de profits pour certains actionnaires et de malheurs planifiés pour le reste du monde.

Nous n’avons pas choisis de fabriquer et de consommer cette merde et personne en doit culpabiliser sur les contradictions imposées par le système. Mais cette industrie guerrière n’a que trop duré. La société française ne veut plus vivre au profit des tonnes d’armes et de polluants qu’elle produit et exporte. Nous ne voulons plus survire, entre deux catastrophes, sur les subsides d’une industrie mortifère. Nous ne voulons plus survivre avec le risque industriel permanent qui impose inéluctablement le sacrifice d’une partie de la population. En premier lieu les risques nucléaires et chimiques. Pour beaucoup de gens, l’explosion d’AZF est une catastrophe industrielle, une de plus après Bhopal, Tchernobyl, l’Erika... une avant la nouvelle. Mais pour nous victimes traumatisées, cette explosion, est aujourd’hui l’argument de trop même si il crée ce lien avec les autres, sinistrés ou bombardés, victimes des guerres, victimes de la guerre économique, victimes et résistants.

Que ce malheur aiguise notre conscience et forge notre force de conviction. Oui, nous sommes près au débat. Oui, nous n’en sommes encore qu’au stade du questionnement et à la recherche de solutions et nous bâtissons solidement notre argumentation. Mais nous voulons débattre de tout. De l’avenir de l’ensemble du processus qui génère les technologies meurtrières. Nous voulons débattre de l’ensemble des problèmes, des besoins, de la consommation, de la croissance, et de la production nécessaire et utile à tous. Il n’est pas trop tard.

Souhaitons que l’explosion de Toulouse serve de détonateur à une transformation sociale en profondeur et ne reste pas un malheureux pétard mortel mais mouillé ?
N’attendons pas sagement la prochaine explosion, imposons la fermeture définitive des usines de morts.

Des habitants de Toulouse , deux mois après l’explosion, le 21.11.2001


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