Retour accueil

AccueilJournalNuméros parus en 2001N°2 - Octobre 2001 > Faits et méfaits des islaméricains

Rechercher
>
thème
> pays
> ville

Les autres articles :


Faits et méfaits des islaméricains


L’islamisme défini par Maxime Rodinson comme un "courant politique inspiré de l’islam, aspirant à répondre au moyen de la religion à tous les problèmes sociaux et politiques et, simultanément, à restaurer l’intégralité des dogmes" peut selon les interprétations ramener aux sources de l’Islam. Par contre on peut dater la naissance de l’islamisme radical avec la création en mars 1928 en Égypte de la confrérie des Frères musulmans par Hassan al-Banna et Sayed Qotb, deux instituteurs. Ils veulent créer un grand mouvement qui reviendrait aux principes originaires de l’Islam en réunifiant le politique et le religieux, ce qui implique une identité absolue entre le juridique et la loi religieuse. Pour eux, il faut une stricte application de la charia. Ils refusent de collaborer avec les pouvoirs établis, jugés impis et appellent à une lutte violente pour faire triompher leurs idées.


La confrérie fonde une organisation armée "l’Ordre spécial" pendant la Deuxième guerre mondiale où au nom de la lutte contre le colonialisme elle prit contact avec les puissances de l’Axe et mena attentats et sabotages. À la suite des assassinats de deux premiers ministres égyptiens successifs de l’immédiate après guerre, les services secrets égyptiens assassinèrent le guide spirituel Hassan el-Banna, en février 1949. Les Frères musulmans participent à la chute du roi Farouk parallèlement au soulèvement des Officiers libres dirigé par le général Naguib et G. Abdel Nasser mais leurs positions politiques sont à l’opposé des militaires. À la suite d’un attentat contre le futur "rais", la confrérie est dissoute, et plusieurs chefs sont exécutés.
Néanmois Nasser a tenté de récupérer les Frères musulmans et d’attirer certains d’entre eux dans son orbite. Les Frères musulmans se dotent d’une organisation internationale à partir de 1961.
Le Canard Sauvage, Caricaturistes et pamphlétaires de la "Belle Epoque", Editions Le Pré-aux-Clercs, recueilli par Jean-Claude Simoën : dessin de Roubille à propos des guerres coloniales - "Ces Figuiguiens n’auront pas gardé longtemps l’illusion d’être plus civilisés que moi.", 1903.
À cette date les fondamentalistes égyptiens sont financés par l’Arabie Saoudite et bénéficient de la coupable bienveillance des services de renseignement américains, unis contre le "Satan" de l’époque Gammal Abd el-Nasser. La politique de Nasser qui se voulait le champion populaire d’un panarabisme laïc teinté de socialisme menaçait directement les pétromonarchies corrompues du golfe et les intérêts américains. La tension devient maximum en 1962 quand Nasser soutint les "républicains" yéménites contre les royalistes, soutenus par l’Arabie Saoudite. Des troupes égyptiennes participèrent même au combat.
La lutte contre les régimes laïcs arabes et les idéologies qui les sous-tendent comme le kémalisme en Turquie, le nassérisme en Égypte ou le baasisme (en Syrie et en Irak) rassemble islamistes, Arabie Saoudite et pétromonarchies et les États-Unis.
* Pour les islamistes radicaux, les États arabes sont des constructions des colonisateurs qu’ils faut détruire afin de reconstituer la communautés des croyants l’Oumma. L’idée nationale est "impie" et considérée comme une invention diabolique des infidèles.
* L’Arabie Saoudite est un Etat important par sa superficie (4 fois la France), par sa richesse (premier producteur mondial de pétrole) mais un "nain" relatif par sa population (20 millions d’habitants à comparer aux 65 millions de l’Égypte, 75 millions de l’Iran). C’est sur le terrain religieux que l’Arabie Saoudite veut installer sa domination : elle est d’abord le gardien de deux des principales villes saintes de l’Islam, La Mecque et Médine. Sa doctrine religieuse le wahhabisme fondé au XVIIIe siècle par Mohammed ibn Abd el-Wahhab (1720-1792), un Bédouin qui après des études théologiques prêcha le retour au Coran et aux sources traditionnelles. Il rejetait avec violence des pratiques telles que le culte des prophètes, des saints et des tombeaux ; il voulait restaurer la vie simple de l’Islam primitif et interdisait l’alcool, le tabac, la musique, des danses, les jeux. Chassé de sa tribu, il trouve refuge en 1740 auprès de Mohammed Ibn Seoud dont il devient le gendre. Avec l’aide de ce dernier il commence à propager sa doctrine dans toute l’Arabie, Ibn Seoud exerçant le pouvoir temporel et lui même le pouvoir spirituel. Les Seoud sont la dynastie régnante de l’Arabie Saoudite. Le wahhabisme très rigoriste est minoritaire dans l’Islam mais peut fournir une doctrine idéale à des masses musulmanes pauvres et à des enfants de la bourgeoisie musulmane en rupture de banc. L’Arabie-Saoudite va financer massivement tous les intégristes du monde musulman. La domination de la famille Ibn Saoud sur les lieux saints de l’Islam est jusqu’à ce jour contestée par la famille Hachémite au pouvoir en Jordanie. L’arme islamique peut aussi être bien utile pour asseoir son pouvoir. * Pour la politique étrangère américaine deux objectifs. Il fallait protéger la rente pétrolière et donc appuyer à tout prix l’Arabie Saoudite et les pétromonarchies du golfe. L’alliance des États-Unis avec l’Arabie Saoudite date du 14 février 1945 lors d’une rencontre entre le président américain Roosevelt et le roi Ibn Seoud. Ils concluent le "pacte du Quincy" : L’Arabie Saoudite s’engage à garantir l’approvisionnement énergétique des États-Unis et ceux-ci s’engagent à lui accorder une protection inconditionnelle (d’où la Guerre du Golfe).
Ensuite les deux pays cogèrent la stabilité (ou l’instabilité) de la péninsule, les deux pays ont un partenariat économique, commercial et financier quasi exclusif et les États-Unis n’interviennent pas dans les questions de politique intérieure. Ces champions de la démocratie libérale n’ont jamais émis de critiques sérieuses sur une monarchie absolue de droit divin, un des régimes les plus obscurantistes et les plus réactionnaires du monde.
L’autre objectif est de contenir l’influence soviétique dans la région. Les soviétiques soutenant par leur politique étrangère, par des conseillers, la Syrie, l’Irak, l’Égypte de Nasser, le Yémen du Nord. La lutte contre le grand Satan rouge passait par un pacte avec le diable vert.
C’est vertu du même principe que les Américains, via la CIA et les autres agences de renseignement, vont financer non seulement la résistance afghane mais aussi les plus radicaux des islamistes dont Oussama Bin Laden.
Oussama Bin Laden est né en 1956 à la Mecque d’une mère d’origine syrienne et d’un père issu d’une grande famille noble du Yémen du Sud.
Son père, dignitaire religieux devient un intime de la famille royale saoudienne et crée une des plus grandes entreprises de bâtiment et de travaux publics du Proche Orient. Ce Bouygues saoudien bénéficie évidemment des commandes d’État et bâtit une fortune immense. Oussama est destiné à prendre la relève de son père, mais après des études d’ingénieur, il se rend à Istanbul et fréquente les milieux islamistes qui soutiennent les combattants afghans. Ce serait là qu’il rencontre pour la première fois des agents de la CIA, qui utilise Istanbul comme lieu de transit des volontaires pour les maquis afghans. Bin Laden participe à la fourniture de médicaments et d’armes en liaison avec les autorités saoudiennes et la CIA. L’entreprise familiale fournit elle aussi son écôt.


No Pasaran 21ter rue Voltaire 75011 Paris - Tél. 06 11 29 02 15 - nopasaran@samizdat.net
Ce site est réalisé avec SPIP logiciel libre sous license GNU/GPL - Hébergé par Samizdat.net