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AccueilJournalNuméros parus en 2001N°2 - Octobre 2001 > Etats-Unis/Ben Laden : l’union

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Etats-Unis/Ben Laden : l’union


En 1980 Ben Laden part lui aussi en Afghanistan et met en place avec l’aide de la CIA seize camps d’entraînement sur la frontière avec le Pakistan. Les États-Unis ont financé, armé et entraîné les islamistes les plus radicaux pour vaincre l’Armée rouge. C’était pour eux la revanche du Vietnam. Ils veulent en outre faire payer aux Soviétiques leur soutien au Vietcong. Par exemple les États-Unis fournissent à partir de 1986 et via le Pakistan le fameux missile sol-air Stinger qui paralysa l’aviation soviétique. Plus de mille exemplaires sont distribués. Après le retrait soviétique, les missiles restants se retrouvent sur le marché au prix faramineux de 150 000 dollars. La CIA essaya sans succès de les racheter. On a retrouvé la trace de ces missiles en Corée du Nord, au Quatar, dans les maquis islamistes algériens et en 1999 au Dagestan.


Les monarchies pétrolières (dont évidemment au premier chef l’Arabie Saoudite) fournissent les fonds et le Pakistan la logistique et les bases arrières. Pour les islamistes radicaux la djihad (guerre sainte) devient un des devoirs de tout bon musulman comme le pèlerinage à La Mecque et même le devoir premier : Abdallah Azem, un palestinien membre des Frères musulmans écrit "Si un peuple ou un État musulman ne parvient pas seul à vaincre ses ennemis, alors le pays voisin, ou l’État le plus proche , a l’obligation de venir participer au djihad et de l’aider. Si cette coalition est encore insuffisante face aux ennemis alors d’autres musulmans venant d’autres États plus lointains ont l’obligation de venir prêter main forte aux moudjaheddines. Et le cercle s’agrandit ainsi de suite, jusqu’à atteindre la totalité du monde musulman, si nécessaire."(extrait de La Défense des pays islamiques comme obligation originaire). Mais la djihad ne s’arrête pas à l’Afghanistan, qui n’est qu’une étape dans la voie de la libération de l’ensemble des pays musulmans dont la Palestine et Jérusalem mais aussi contre des gouvernements "faussement musulmans comme ceux par exemple d’Égypte et d’Algérie. Viennent ensuite la Tunisie, le Maroc, la Libye, la Syrie....
Sur un char russe, les Tchétchènes fêtes la reprise de Grozny, août 96.
Parallèlement à un travail militaire, Ben Laden s’engage politiquement auprès d’un parti islamique radical lié aux services secrets Pakistanais (ISI). Bin Laden participe activement à la lutte contre les Soviétiques de 1982 à 1989. Au retrait des Soviétiques, une partie les combattants islamistes - Richard Labévière, ancien journaliste de la Télévision suisse romande aujourd’hui à RFI, dans Les dollars de la Terreur (Grasset, 1999) estime à 10.000 les volontaires arabes venus combattre en Afghanistan - s’égayent dans la nature et vont fonder les Groupes Islamiques Armés en Algérie, renforcer les Gama’a égyptiennes ou les Frères musulmans syriens et libyens. Richard Labévière remarque que "Les Afghans recrutent parmi les victimes de la libéralisation économiques en cours (et) leur rhétorique islamo-égalitariste sert à blanchir et intégrer les délinquances locales dans des circuits d’affaires plus larges".
Bin Laden, dont la fortune est estimée dans les années image 236 x 315 1990 à plusieurs milliards de dollars, finance à partir du Soudan près de 23 camps d’entraînement, il se rend souvent en Afghanistan en pleine guerre civile où il rencontre experts de la CIA et services pakistanais. La guerre du Golfe entraîne une fracture entre l’islamisme et l’Amérique.
La présence de 500.000 soldats américains (pour la plupart "infidèles") dans le royaume saoudien provoque la colère des religieux. C’est semble t-il à ce moment-là (Libération du 15 septembre 2001) que Bin Laden qui a créé en 1988 sa propre organisation al-Quaeda ("la base") déclare la guerre à l’Amérique. Il soutient les groupes islamiques en Algérie, en Égypte et au Yémen. Les protestations de ces pays obligent Ryad à lui retirer provisoirement son passeport. Il s’installe ensuite au Soudan qui devient le nouveau foyer de l’intégrisme mondial. En 1994 il est déchu de sa nationalité saoudienne et sa famille affecte de le renier pour ne pas gêner ses lucratives affaires avec la famille royale saoudienne. Bin Laden se met sous la protection du chef de la junte islamiste soudanaise Hassan al-Tourabi qui se voit jouer un rôle mondial. Les affaires continuent et en parallèle Bin Laden forment des Égyptiens, Algériens, Philippins... C’est au Soudan qu’est planifiée la tentative d’assassinat du chef de l’État égyptien Hosni Moubarak en juin 1995. Le Soudan est mis sous embargo par l’ONU et Bin Laden est obligé de quitter le pays.

Retour en Afghanistan

En 1996, il se réinstalle en Afghanistan. Bien que déchu de sa nationalité saoudienne il continue à maintenir le contact avec le prince Turki responsable des services saoudiens (jusqu’à la fin août 2001 où il est remplacé par un autre cousin du roi) et le groupe Bin Laden bénéficie toujours des mannes des commandes royales ou étatiques. Lorsque que les taliban prennent Kaboul, Bin Laden est au Soudan. Dans un premier temps il se méfie des taliban qui prennent le contrôle de la route de l’opium, qu’il avait sous sa coupe. C’est pour rouvrir son fructueux commerce que Bin Laden (et ses "Afghans") s’allie avec les taliban qui en retour lui garantissent une protection face aux pressions internationales. Il devient un proche du mollah Omar, chef suprême des talibans et se fait même construire une résidence à côté de celle du chef religieux. Les Américains ont même eu quelques coupables indulgences avec le nouveau régime taliban. La dimension économique n’était pas abstente dans un vaste projet de pipeline entre l’Asie centrale et le Pakistan qui permettait d’éviter l’Iran et d’ennuyer la Russie.
Les réseaux intégristes en général et la nébuleuse Bin Laden en particulier ont installé de vastes réseaux d’informations et blanchiement d’argent plus ou moins sale, en utilisant tous les moyens du capitalisme (société écrans, fondations, place off-shore...) la tête de pont se trouve en Angleterre où ils disposent aussi de journaux, de radios et même de télévision.
Bin Laden fournit aux taliban son aide financière mais aussi de nombreux soldats indispensables au régime dans sa lutte contre l’opposition afghane de "l’Alliance du Nord". Ben Laden s’est même rendu indispensable auprès des Pakistanais qu’il aide dans la lutte contre l’Inde en soutenant conjointement les sécessionnistes cashmères. Le quadruple attentat suicide aux États-Unis va rompre ce lien, le régime pakistanais en déroute financière et économique ne peut pas se mettre à dos l’allié américain.
La nébuleuse intégriste fonctionne de manière horizontale, des groupes autonomes peuvent très bien agir seuls sans décision d’un supérieur. Il suffit d’une fatwa émise par un chef spirituel pour qu’une action soit adoptée et appliquée. Même si la piste Bin Laden est vraissemblable, on ne peut pas exclure le fait que certains groupes formés par lui se mettent à fonctionner de manière autonome. Une autre hyphothèse est possible celle de l’opération de provocation : les réseaux Bin Laden ont laissé de nombreuses traces et l’enquête fut facile à remonter, comme si Bin Laden n’attendait qu’une riposte des Américains pour provoquer une solidarité et (un soulèvement) des masses pauvres musulmanes contre le Satan américain. Le risque d’embrasement est réel même s’il n’est pas assuré, l’islamisme radical à la Bin Laden étant ultra minoritaire et ne rassemblant que quelques milliers d’activistes.
Jean Raymond à Moscou avec l’aide précieuse de Lotfi


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