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AccueilJournalNuméros parus en 2001N°2 - Octobre 2001 > Retour sur Gênes et sur diverses séquelles

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Retour sur Gênes et sur diverses séquelles


Début septembre, deux manifestants de Gênes ont été successivement arrêtés sous l’accusation d’avoir participé à l’assaut de la jeep de carabiniers aucours duquel Carlo Giuliani a été abattu. Ils ont été mis en examen pour "tentative d’assassinat" : cet intitulé a évidemment pour but de transformer l’assassinat de Carlo par un carabinier en acte de légitime défense. Quels que soient les moyens de défense qu’ils choisiront, notre solidarité avec ces camarades doit être totale, comme elle doit l’être pour tous ceux qui, après la sauvage répression des manifestations anti-G8, se sont retrouvés inculpés. De même convient-il de développer notre soutien aux manifestants de Göteborg qui viennent d’écoper de lourdes condamnations. Le plus lourdement condamné, Paul Rodinson, a pris un an de prison pour des jets de pavés non prouvés (on peut lui écrire : Paul Robinson 1090, Goteborg remand centre (haktet), Goteborg polis headquarters (polis huset), box 429, 40126 Goteborg, Sweden.) Le 30 septembre, un concert de solidarité avec les inculpés doit avoir lieu à Paris, au CICP, 21 ter rue Voltaire. Que mille initiatives fleurissent en ce sens !


image 197 x 136 La solidarité exige aussi qu’un peu de clarté soit faite sur les responsabilités d’une gauche qui aujourd’hui s’acharne à présenter les émeutiers, tous regroupés sous l’étiquette black blocks, comme des marionnettes de la répression, tous manipulés par les flics. Cette gauche, dont le piteux Agnoletto a repris le discours, c’est elle qui a installé le dispositif paranoïaque-sécuritaire de la zone rouge et de sa forteresse, c’est elle qui a réuni une armée de 18 000 flics suréquipés et hypermotivés, persuadés de représenter les forces du bien contre celles du désordre. Après Gênes, les syndicats de flic italiens ont pleurniché qu’on cherchait à les " délégitimer ". La vérité est que, depuis quinze ans, parce qu’elle était désespérément en quête d’un moyen de se distinguer de la droite, la gauche a fait des policiers et des juges ses nouveaux héros, les représentants de la pureté démocratique. La police et la justice ont été surlégitimitées par cette gauche qui n’a plus rien à voir avec le mouvement ouvrier d’autrefois.
Celui-ci avait bien des défauts, mais au moins, considérait-il que flics et juges devaient être sans cesse contenus et combattus pour ce qu’ils sont : la première ligne de défense de la société d’exploitation. Si les flics italiens ne s’étaient pas sentis comme investis d’une mission par l’ensemble de la société (c’était une illusion, mais cette illusion a été largement fabriquée par la gauche), ils ne se seraient peut-être pas conduits comme s’ils pouvaient tout se permettre. La gauche est co-responsable avec Berlusconi et Fini de la mort de Carlo et de toutes les exactions policières qui ont accompagné et suivi les manifs anti-G8. Il est donc d’autant plus insupportable qu’elle reprenne, à propos des manifestants du Black Block, la théorie du complot. Et dans la mesure où, certains, parmi les tute bianche ou d’autres composantes du mouvement, reprennent à leur compte cette théorie, ils doivent être critiqués sans concession.
C’est une chose de considérer que telle ou telle composante s’est retrouvée à faire le jeu de l’ennemi, c’en est une autre de décider qu’elle EST l’ennemi : cette différence ne devrait être perdue de vue ni par les black blocks (comme ceux qui envoyèrent à l’hôpital un camarade des Cobas), ni par les Tute. Tous les tute bianche avec qui nous avons été en contact étaient d’accord sur le fait qu’il ne fallait pas criminaliser les black blocks,
mais discuter avec eux. C’est sur cette base minimum que nous avons poursuivi des échanges avec ces tute-là. Mais nous ne sommes pas d’accord avec l’idée, dominante chez eux, selon laquelle l’ensemble des activités émeutières à Gênes, regroupées sous le vocable black blocks, avaient été instrumentalisées par le pouvoir. Comme il était dit dans le texte " Les multiples visages de la révolte globaleS" (voir précédent numéro), on peut (c’est notre cas) critiquer beaucoup les pratiques des BB à Gênes, on ne saurait " les réduire à une armée de marionnettes de la répression ".
Il faut une sacrée dose de mauvaise foi pour lire dans Les multiples visagesS une adhésion à la théorie complotiste et à l’entreprise de criminalisation qui l’accompagne. Sur la présence de flics parmi les émeutiers, il n’y était dit rien de plus que ce qu’ont dit, par exemple, des membres d’un " groupe affinitaire actif au sein d’un black block " dans leur texte diffusé sur la liste no-G8 : " Nous ne nions pas la possibilité que des policiers "déguisés" se soient infiltrés dans certains black blocs. Il semblerait logique qu’il y ait eu des policiers infiltrés dans tous les cortèges. " Les " preuves " filmées présentées à la presse par les cinéastes de la gauche n’étaient apparemment guère convaincantes mais il est incompréhensible de s’acharner à prétendre qu’il n’y aurait pas eu l’ombre d’une infiltration chez les émeutiers : ce serait bien la première fois dans l’histoire des émeutes et des activités politiques en général que des flics y auraient été totalement absents ! Des flics s’étaient sûrement glissés parmi les Black Blocks, comme chez les Tute Bianche et à Attac, comme chez les journalistes et les infirmiersS Ici, comme ailleurs (comme dans le cas, cité en exemple par le texte Les multiples visagesS, du mouvement anti-CIP), cela ne change rien à la légitimité des révoltes et ce n’est pas cela qui doit orienter la nécessaire critique des pratiques. C’était un acquis de divers mouvements qui se sont développés ces dernières années (décembre 95, soutien aux sans-papiers, mouvement des chômeurs) et c’était une caractéristique des plus neuves et prometteuse du mouvement dit " anti-globalisation " que la volonté de faire co-exister des courants et des pratiques très différents, dans une action commune où chacun échange avec l’autre sans concession sur l’essentiel de ce qui fait son identité.
Depuis Gênes, la théorie complotiste et la criminalisation des Black Blocks ont gravement compromis cette coexistence. A une échelle lilliputienne, c’est à dire parisienne, on a pu constater le 10 septembre, lors d’une
réunion sur " violence et radicalité ", qu’un autre dérapage pouvait aussi menacer la recherche d’une communauté d’action : l’intégrisme émeutier qui prétend imposer ses vues par la menace physique. Il semble que dans ce nouveau dogme, le seul fait d’envisager qu’il ait pu y avoir des flics infiltrés chez les BB (y compris avec toutes les nuances ci-dessus énoncées) suffit pour être traité comme un ennemi.
La logique guerrière dans laquelle le gouvernement étatsunien entraîne aujourd’hui le monde annonce des jours difficiles pour les réfractaires à l’ordre mondial. L’anecdote de la réunion agitée, tempête dans le verre d’eau tiède des activistes parisiens, n’est qu’un des symptômes des nombreuses faiblesses des milieux anticapitalistes radicaux. Que certaines de ces faiblesses soient aussi dérisoires que ça n’est pas pour rassurer.
SQ, MB, HA,
Nathalie B et Gaël G - Nous souscrivons entièrement à ce texte en émettant toutefois une réserve : faisant partie pour des raisons politiques de ce fantasmatique Black bloc nous n’avons pas rencontrés de Tutte n’ayant pas une attitude criminalisante ou caricaturale en dehors de ceux qui se sont joints aux émeutiers. Sinon nous sommes toujours en attente d’un réel débat sur la question de la radicalité dépassant les insultes crétines et les procés d’intention.

PERQUISITIONS ET ARRESTATIONS DANS TOUTE LA PÉNINSULE

Dans la nuit 17 septembre et au cours de la journée du 18 septembre des rafles ont été conduites dans différentes villes d’Italie. Les agences de presses italiennes parlent de 100 perquisitions conduitent en même temps dans tout le pays. Il a été procédé à au moins 60 arrestations. On été perquisitionnés des appartements (deux à Cuneo, un à Mondovi, deux à Milan, trois à Turin, un à Catania, trois à Venize, un à Mestre, cinq à Triestre, quatre à Padoue, trois à Vittorio Veneto, 4 à Florence), des immeubles occupés (Villa litta à Milan) et des centres sociaux et des locaux militants (La Scintilla et le Rivalsa à Modène, ce dernier ayant été dans la foulée expulsé, un infoshop à Pise). La liste définitive (non encore véritablement établie) est plus vaste ,on parle d’une opération de police ayant concerné entre autre les villes de Trieste, Padoue, Aost, Nuoro, Gagliari, Grosseto, Cuneo, Florence, Pise, Catania, Orvieto, Venise, et la Sardaigne visiblement à la demande du parquet de Milan. A la Villa Litta Occupata (déjà perquisitionnée il y a un peu plus d’un moi) à Milan 12 personnes ont été arrêtées. Flics en civil cagoulés, digos (police politique) et flics anti-émeute ont pris d’assaut le bâtiment. Lors de la rafle le rez-de-chaussée a été dévasté et des documents ont été saisis. Contre deux des interpellés une enquête a été ouverte en vertu de l’art. du § 270 bis pour " organisation subversive ". Cette affaire porterait entre autres choses sur de soi-disantes tentatives d’attentats à la bombe sur la basilique de Sant Ambrogio de Milan (le 28.06.00) ainsi que sur le Dôme de Milan (le 18.12.00). C’est semble-t-il les motifs qui couvrent l’ensemble de ces opérations.

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* ATTENTATS INCENDIAIRES SUR LE CENTRE SOCIAL PINELLI : Dans la nuit de samedi 15 à dimanche 16 septembre dernier le Centre social Pinelli de Gênes a été victime d’un début d’incendie (au coktail molotov). Il n’y avait personne dans le batiment au moment des faits (donc pas de blessés), mais des ordinateurs, du matériel d’info et une partie de l’équipement intérieur ont été détruits. Le bâtiment reste pour l’instant inutilisable. Une manif est prévue pour samedi prochain. Le même soir, Piazza Alimonda, lieu où a été assassiné Carlo Giuliani, ont été brûlés divers signes de solidarté qui y sont régulièrement déposés. On suppose que ces attaques ont été perpétrées par des fachos. Pour Gênes cette situation est nouvelle. On peut partir de l’idée que les fachos agissent de la sorte se sentant, depuis le G8, couverts par la police et l’Etat si ce n’est pas directement soutenus.

* AUTRE PERQUISITION À MILAN : Pendant la perquisition du Centre social Vittoria et d’une maison occupée (dans via Gola), à Milan, mercredi 5 septembre à 7 heures du matin, furent arrêtés Antonio, Elio et Mario. La raison en est leur participation à une manif antifa le 25 avril dernier. Il s’agissait entre autres choses d’une manif contre les Skinheads de Forza Nuova qui entendaient déposer une couronne de fleurs sur la place où Mussolini fut pendu. Lors des perquisitions la police confisqua des drapeaux rouges et des petites plantes de cannabis. Les personnes arrêtées se trouvent à la prison San Vittore. Une décision du juge instructeur est attendue pour ces prochains jours.

* MANIFESTATION NATIONALE : Enfin, une manifestation nationale a eu lieu le samedi 22 septembre en riposte à cette vague d’arrestations et les attaques contre les centres sociaux et immeubles occupés : "contre la répression sociale et ses remugles fascistes".
Source : Indymedia Italie (italy.indymedia.org ) et mailing list des centres sociaux ( www.ecn.org/lists/cslist )


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