Retour accueil

AccueilJournalNuméros parus en 2002N°7 - Mars 2002 > La lettre des officiers

Rechercher
>
thème
> pays
> ville

Les autres articles :


La lettre des officiers

Ouzi Dekel


Le vendredi 25 Janvier est parue dans les journaux une lettre signée par 52 officiers et soldats de réserve.


Le premier signe a été donné le 18 Janvier par le Dc Igaal Shohat, colonel réserviste, précédemment aviateur (il avait été blessé et emprisonné dans les prisons égyptiennes en 1970). Il est aujourd’hui médecin et il a été parmi les premiers officiers à appeler dans la presse " les soldats à refuser de servir dans les territoires, les aviateurs à refuser de bombarder les arabes, et les conducteurs de bulldozers à refuser de détruire des maisons ". Il y a des gens qui ne voient jamais le drapeau noir même quand il s’agît de tuer des valeurs. Il y a des gens qui ne voient le drapeau noir que lorsqu’ils vieillissent, comme moi, car quand j’étais jeune pilote je n’étais pas très regardant ". Le refus est avant tout une action, une initiative, un acte personnel.

Qui sont les objecteurs ?

Les nouveaux objecteurs ont environ 30 ans, ils ont grandi pendant la guerre du Liban, ont fait leur service militaire obligatoire pendant l’Intifada, ils ont vécu la période des accords d’Oslo et de Rabin, ils ont aussi vécu la mort des accords d’Oslo et de Rabin et sont pour la plupart d’origine ashkénaze.

Leitmotiv (thème) des objecteurs et l’influence morale et citoyenne de Yshaiaou Leibovitz :

" …et de là le jugement des 140 objecteurs qui ont refusé des actions au Liban qui transforment l’armée israélienne de défense en une armée israélienne d’occupation. Et qui acceptent d’assumer les résultats de leur refus, ceux-là sont les héros d’Israël dans le sens de l’héroïsme décrit dans la première phrase du Code Rituel : " ne pas avoir peur des moqueurs (persifleurs)… Si le phénomène devient collectif, même minoritaire, il pourrait ébranler le consensus national - fasciste au sein de l’opinion toute entière et montrer le début du chemin du retour de la bestialité vers les valeurs humaines et juives de notre existence nationale ".

Yshaiaou Leibovitz : l’homme qui combat et son pays – 1985

Rami Kaplan :

Rami Kaplan, chef adjoint de bataillon réserviste, a raconté sur la première chaîne de la télévision que l’ancien chef de la division de Gaza, le général Yair Nave, avait ordonné à ses soldats de profiter de l’occasion des directives d’ouverture de feu pour tirer sur les ouvriers palestiniens qui tentaient de franchir les grillages autour de la bande de Gaza. " J’ai essayé de m’y opposer assez mollement mais je n’ai pas réussi à le faire efficacement bien que j’avais parfaitement bien compris le sens de ses ordres. Il faut comprendre que, dans un système militaire, quand arrive un officier supérieur du terrain très autoritaire et charismatique, il est difficile de s’opposer à lui. De fait, il est impossible de se lever et de dire : c’est un ordre apparemment illégal ".

Ami Ayalon

Le soir même de la publication de la première lettre du refus, le commandant réserviste Ami Ayalon, chef du Chabak jusqu’il y a six mois, (les services de renseignements généraux), donnait une longue interview à la télévision. Réagissant sur la lettre, il a dit qu’il avait de la sympathie pour les objecteurs . Il a dit aussi qu’il était inquiet que peu de soldats qui servent dans les territoires refusent d’exécuter un ordre apparemment illégal : " tirer sur un jeune désarmé est un ordre illégal " Ayalon prétend que la classe dirigeante n’a aucune visibilité politique ni même de convictions et a prôné la séparation.

La semaine suivante, lors d’une réunion de l’antenne de Jérusalem du comité juif- américain, Ami Ayalon faisait état des ses observations quant à la politique du président Bush et de la guerre anti-terreur menée contre Ben Laden. Ayalon a dit des américains qu’ils n’avaient jamais rien compris au Proche Orient et qu’il n’y avait aucune chance qu’ils y comprennent un jour quelque chose. Alors qu’Israël se repose complètement sur l’attitude de l’administration américaine au Proche Orient, elle ferait mieux – selon Ayalon – de se demander " ce qui vaut pour les Etats Unis, est-il bien pour Israël ? ".

Le groupe El Quaida de Ben Laden, contre lequel les américains ont déclaré une guerre sans merci, n’a jamais été au centre du fondamentalisme islamique. Jusqu’à il y a 6 mois, il était considéré comme une secte presque marginale bien que radicale.

D’après lui, la réussite américaine dans la guerre contre la terreur n’est que temporaire. Si la mesure du succès est l’arrêt des attentats, il vaut mieux laisser tomber ce critère, si en revanche la mesure du succès est le statut de El Quaida, alors on peut voir que l’organisation, qui était une secte marginale est devenue un élément central dans la vision de l’Islam par rapport à la globalisation.

Dans l’analyse de la réalité israélienne, Ayalon prétend que les experts du renseignements diffusent aux américains l’information que "Plus la pression sur Arafat augmente, plus il y a de chances qu’il rampe à la table des négociations". Sur cette base le gouvernement donne son feu vert total pour agir contre les palestiniens. Le paradoxe est qu’il y a une contradiction profonde entre les intérêts américains au Proche Orient et la politique menée dans le contexte du conflit israélo-palestinien. La découverte du bateau " Karine A " en est la preuve : elle aurait du alerter les américains et leur faire prendre conscience de ce qu’il arrive quand Arafat se sent pris au piège et de ce que devient l’influence iranienne quand il n’y a pas de processus d’état. Au lieu de cela, ils sont arrivés à la conclusion inverse.

Ayalon dit aussi qu’Israël doit se séparer d’un Etat palestinien pour garder son caractère sioniste : "Je soutiens que gagner cette guerre serait pour nous une catastrophe ; cela ne ferait que renforcer une réalité dans laquelle nous rendrons la création d’un état palestinien impossible. L’état palestinien est dans l’intérêt d’Israël".

La première réunion à laquelle ont été invités les signataires de la lettre a eu lieu mercredi de la semaine dernière dans une auberge de jeunesse de Tel Aviv. Cette réunion a eu lieu à huis clos et 130 officiers et soldats réservistes y ont participé parmi les 230 signataires. Cette réunion était fermée à la presse et l’identité de chacun des participants a été vérifiée avec précaution. Le porte parole du groupe, Amit Massiah, a dit qu’ils se préparaient pour un combat de longue haleine. "Nous continuerons à susciter un débat sur le prix élevé et insupportable que demande notre présence dans les territoires". (...)


No Pasaran 21ter rue Voltaire 75011 Paris - Tél. 06 11 29 02 15 - nopasaran@samizdat.net
Ce site est réalisé avec SPIP logiciel libre sous license GNU/GPL - Hébergé par Samizdat.net