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AccueilJournalNuméros parus en 2002N°8 - Avril 2002 > Travail social et médiation sociale

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Travail social et médiation sociale

Dans les dispositifs sécuritaires


En tant que travailleur social (éducateur spécialisé) on peut mesurer les conséquences des politiques actuelles sur le travail social, et plus précisemment sur ce qui fait recette actuellement et qui risque de durer : le discours et la pratique sécuritaire.


Le travail social est déjà sérieusement touché par le libéralisme, puisque rentrent dans nos pratiques les notions d’objectifs, de rentabilité, et autres termes délicieux que voudraient nous image 168 x 198faire gober les politiques sociales. L’ " élu " voit rarement plus loin que son mandat électoral, et la notion de travail à long terme ne l’intéresse pas, pas plus que le bien être des personnes qu’on accompagne, non, ce qui le motive c’est qu’il y ait moins de voitures qui brûlent, moins d’vols, moins d’agressions, et que l’on ne voit plus les gueux dans la rue car ça fait sale. Et tout cela rejoint le sécuritaire.
En effet, le social n’a jamais bénéficié d’un gros budget (!), et ce n’est pas en ce moment que les travailleurs sociaux vont avoir les moyens de faire du bon boulot et être réellement "au service des usagers".
Car la tendance actuelle est plutôt de financer la sécurité, et de remplacer les éducateurs de rue, par exemple, par des flics (ce qui a été largement pratiqué par les mairies du Front national, et va l’être par la gauche si ca continue), par des "agents de médiation", et autres emplois spécial jeunes.
Voyons de plus près les propositions de nos chers politicards en matière de travail social :
- On entend parler de centre d’éducation renforcée, ce qui existe déjà, et ne représente qu’une infime partie des jeunes, et ne résoudra en rien le problème.
- On entend parler de réforme de l’ordonnance de 1945, sous prétexte que les jeunes ont changé depuis (ah bon ?), mais ce qu’ils ne disent pas c’est que le texte a sérieusement évolué depuis… Ce qui les gêne surtout, c’est que cette ordonnance donne la priorité à l’éducatif sur le répressif, et ça ils aimeraient bien l’inverser pour appliquer leur "tolérance zéro", et mettre des enfants en prison… Rajoutons au passage que cette ordonnance donne déjà les moyens répressifs suffisants, et que ce n’est pas parce qu’un jeune ne va pas directement en prison sans passer par la case départ qu’il "ressort en toute impunité" comme le disent les adeptes de la secte sécuritaire ; il y a toute une panoplie de mesures éducatives et d’accompagnement visant à aider la personne à "s’en sortir" et à éviter la prison qui n’est pas le meilleur endroit pour grandir !
- On entend surtout beaucoup parler de ce magnifique concept made in U.S.A : la "tolérance zéro". On va donc bousiller la vie de personnes déjà en souffrance qui vont enfreindre la loi pour une connerie ou pour des raisons légitimes, en les envoyant en prison au moindre écart à la règle ? Alors il faut supprimer le travail social, mettre les délinquants en taule, et les pauvres à l’hôpital, comme au bon vieux temps, et puis on change le mot démocratie et on y met celui de dictature et voilà, c’est fait, plus de problèmes…
Il est clair que tant que le social n’aura pas les moyens réels d’accompagner les "usagers" (pardon pour le jargon, mais cela regroupe l’ensemble des personnes avec qui on travaille dans le social car il n’y a pas que "les jeunes délinquants", notre travail regroupe le secteur de la difficulté sociale et économique, de la déficience intellectuelle, de la maladie mentale, de la toxicomanie et l’alcoolisme, etc…, tout ceci pouvant évidemment se recouper), et tant que l’on n’osera pas regarder en face les causes de ce qu’ils appellent "l’insécurité", rien n’avancera. Certes on va faire baisser un peu la délinquance et cacher la misère, mais on ne résout rien en s’en tenant au symptôme. La société capitaliste est malade (par définition !) et son état va s’empirer…
Les " jeunes délinquants " sont apparemment la cause de l’ensemble des maux de notre société : ils volent, ne se tiennent pas à l’école, ne respectent rien ; c’est bizarre parce qu’ils ont en face d’eux des adultes et des hommes politiques exemplaires, intègres, honnêtes, qui se rendent gentiment à l’assemblée et qui se respectent tous entre eux…Je tiens à souligner que mon propos n’est pas de dire qu’il n’y a pas de délinquance ou que celle-ci est excusable, mais qu’elle est explicable et que cela n’est pas très étonnant au vu de la violence qu’engendre le système capitaliste.
Pour finir, je rajouterais que les travailleurs sociaux ne seront pas des contrôleurs sociaux, ni des sparadraps pour cacher la misère. Je ne me leurre pas car je sais que c’est l’ambiguïté de notre profession, mais un éducateur se doit d’être subversif à la commande politique et ne pas laisser n’importe quelle politique sociale passer. Le problème est que les travailleurs sociaux ne se bougent pas beaucoup, mais gardons espoir car cela progresse et certains commencent à s’organiser. No pasaràn !

Franck. Scalp de Nantes


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