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AccueilJournalNuméros parus en 2002N°6 - Février 2002 > Rencontres internationales antifas

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Rencontres internationales antifas


Tout au long de la première semaine de janvier de cette année, des camarades antifascistes français, allemands et autrichiens se sont retrouvés à Paris pour partager leurs expériences, leurs pratiques et leurs discours, à travers une présentation de la situation hexagonale.


Cette rencontre constituait le second volet d’un échange entre des antifascistes autonomes de Francfort-sur-le-Main, le Scalp-Reflex de Paris et la Rosa Antifa de Vienne (RAW), à l’initiative des camarades allemands. L’objectif de cet échange est de découvrir pendant une semaine le pays d’accueil, avec ses spécificités militantes et sa réalité sociale et politique, et de les mettre en perspective à travers le regard extérieur des camarades étrangers : l’échange est donc sa propre fin, même si bien entendu les projets de travail en commun à moyen ou long terme sont envisagés.

Le premier volet qui s’était déroulé à Francfort au début du mois d’août nous avait ainsi permis de participer à une manifestation de soutien aux réfugiés, de découvrir la triste réalité de l’importance de la scène néo-nazie dans la jeunesse de certaines régions d’Allemagne et de l’importance grandissante de la Nouvelle Droite sur le discours politique, de nous sensibiliser au poids de l’histoire nazie sur les mentalités de ce pays à travers une visite de la ville et de ses lieux de mémoire, et surtout lors d’une discussion avec le résistant Peter Gingold, ou encore d’en apprendre davantage sur l’histoire du mouvement autonome allemand des années 1980-1990 à travers le témoignage de ses principaux acteurs sur Francfort (le groupe LUPUS en particulier)…

Nous avons essayé sur Paris de conserver cette richesse et cette variété des thèmes abordés à Francfort. Aussi, après une présentation des différents groupes présents, une présentation du Réseau No Pasaran a été faite aux camarades allemands et autrichiens, suivis d’un historique de la lutte des sans-papiers, et d’un compte rendu-débat autour de la mobilisation de Bruxelles, afin que l’échange s’ancre dès le début dans la réalité militante.

Le lendemain, Alain, de l’association des Amis de la Commune de Paris, a été notre guide pour une visite historique de la ville, du cimetière du Père Lachaise à la place Blanche, jusqu’à Montmartre, pour évoquer la révolution communarde, à travers ses principales figures et de nombreuses anecdotes.

Le premier janvier, nous avons entamé notre après-midi de discussion autour des contre-cultures. C’est d’abord autour d’Internet que la conversation s’est engagée, après une présentation de l’histoire de Samizdat.net ; après une présentation de l’histoire de la scène musicale alternative en France, du milieu des années 1980 à nos jours, nous avons pu nous rendre compte des différences de part et d’autre du Rhin en terme de mode musicale dans les circuits alternatifs. Mais c’est aussi l’organisation de concerts mêlant musique et débat sur les pratiques antifascistes et anticapitaliste qui a été présentée, puisque notre réseau a toujours attaché une importance particulière à la nécessité de créer des lieux de rencontre conviviaux pour faire avancer nos idées.

C’est à mi-chemin du séjour que nous avions décidé d’aborder la question de l’extrême droite et celle des moyens de combattre les idéologies autoritaires et xénophobes, avec Jean-Yves Camus comme intervenant principal. Auteur de nombreux ouvrages de référence sur le sujet (Les Droites nationales et radicales en France aux éditions PUL, Le Front National, Histoire et Analyses aux éditions Olivier Laurens…), Jean-Yves Camus connaît bien l’extrême droite en Allemagne et en Autriche, puisqu’il a animé le CERA (Centre Européen de Recherche et d’Action sur le Racisme et l’Antisémitisme), qui a publié plusieurs rapports sur l’extrême droite en Europe, en collaboration avec de nombreux chercheurs européens. L’évocation de la situation actuelle de l’extrême droite française a ensuite fait place à un échange d’information sur la collaboration entre les différents partis nationalistes xénophobes européens et les moyens d’y faire face.

L’après-midi, toujours sur le même thème, concernait davantage les pratiques antifascistes concrètes, que ce soit le nécessaire travail d’information et de sensibilisation (à travers la présentation du travail de REFLEXes, revue d’enquêtes et d’analyse sur l’extrême droite), ou bien la mise en place de réseaux de solidarité internationale entre militants antifascistes, avec comme illustration concrète l’implication du groupe Scalp-Reflex dans le comité de soutien aux antifascistes emprisonnés SRA (Solidarité Résistance Antifa).

Mais la conversation sur la question de l’internationalisme a ensuite dévié sur la question plus large du soutien à apporter en tant qu’antifascistes dans les conflits mondiaux actuels, et particulièrement dans le cas du conflit israélo-palestinien. Des divergences de point de vue ont alors été mises à jour, avec en toile de fond la question de l’antisionisme (comment le distinguer de l’antisémitisme ?) et celle de la discrimination et de l’oppression des minorités (ne pas laisser les populations civiles, en particulier palestinienne, être les premières victimes du conflit). Cette discussion animée a ainsi permis d’atteindre l’un des principaux objectifs de l’échange : partager des visions du monde différentes, afin de mettre en perspective nos propres réflexions et nos propres pratiques.

La présentation le jour suivant, par Jean-Luc Einaudi et Bernard Schmidt, du passé colonial de la France à travers l’exemple de l’Algérie en général et du 17 octobre 1961 en particulier (avec la projection du film documentaire Drowing by Bullet, qui retrace le déroulement de la manifestation et sa répression à travers de nombreux témoignages) a permis de replacer la discussion de la veille dans le contexte français et d’évoquer l’importance de ce passé colonial à la fois dans les spécificités des discours xénophobes et sécuritaires tels qu’ils existent chez nous, et plus largement dans les représentations des différentes minorités en France. Cela fut également l’occasion d’aborder une autre question, celle de la continuité politique de l’État, en discutant sur le cas particulier de François Mitterrand. Cette question de la continuité sera d’ailleurs au cœur des débats à Vienne cet été, pour le troisième volet de l’échange.

Enfin, afin d’élargir nos horizons militants, nous avons clos l’échange par une discussion libre sur la question de l’engagement et du contre-pouvoir, avec comme invité extérieur Miguel Benassayag ; par delà nos divergences, nous avons ainsi pu mesurer la proximité de nos actions, et la nécessité de poursuivre et de renforcer toutes les formes de collaboration internationale, sur la question antifasciste comme sur l’ensemble de nos luttes.


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