Retour accueil

AccueilJournalNuméros parus en 2002N°6 - Février 2002 > Russie : Poutine serre la vis

Rechercher
>
thème
> pays
> ville

Les autres articles :


Russie : Poutine serre la vis



Fin janvier le pouvoir russe a fait fermer la chaîne de télévision russe TV6, dernière télévision indépendante du pouvoir, en l’a remplaçant par une chaine sportive. Avec ce coups de force, le pouvoir s’assure d’un contrôle total de l’information télévisée en Russie. Cette fermeture comme la reprise en main de la chaîne NTV l’an dernier, marque aussi l’échec de l’opposition libérale et démocrate en Russie, qui pendant l’ère Eltsinienne, ont fait confiance à des oligarques véreux pour assurer leurs libertés, en particulier la liberté de la presse. Ne subsistent pour le moment que quelques radios privés et quelques journaux. L’indépendance de ces médias même est toute relative car ils appartiennent à des financiers qui devront passer à un moment ou un autre sous les fourches caudines du pouvoir.

TV6 n’était pas non plus le parangon de vertu qu’on veut bien le dire maintenant. Au niveau des programmes c’était un robinet à séries et films américains et c’est la seule chaîne russe à diffuser le "Loft" local.

Par contre son équipe de journalistes était parmi la meilleure de Moscou, puisque virée l’année dernière de la fameuse NTV. C’est évidemment cette équipe qui était visée, qui avait fait ses armes sur NTV lors de la première guerre de Tchétchénie en informant sur l’enlisement, sur les exactions de l’armée rouge. Or, même si la couverture de la deuxième guerre de Tchétchénie était nettement moins critique, elle restait une épée de Damoclès, d’autant plus que les exactions de l’armée russe atteignent des sommets (escadrons de la morts, tortures, disparitions...). Alors que la NTV a perdu 40% de son audience après le coups de force, TV6 était en progression.

Le contrôle de l’information n’est que la partie la plus visible d’un iceberg de conformisme. Le parlement est dans les mains du pouvoir, après la fusion des trois partis Unité, la Patrie, et Toute la Russie et leur allégeance à Poutine. Il s’assure du contrôle étroit de l’appareil d’État, en écartant les obligés de Eltsine et de la Famille, qu’il remplace systématiquement par ses proches, souvent des anciens du KGB.

Le Kremlin a suscité un mouvement de jeunesse dont la dernière idée lumineuse a été de proposer l’échange des mauvais livres contre des bons. Parmi les auteurs à l’index on trouvait Marx ou le romancier peu conformiste Victor Pelevine. L’Église orthodoxe est de plus en plus en odeur de sainteté au Kremlin, Poutine multiplie les rencontres avec les dignitaires de l’Église orthodoxe, et les visites aux monastères. Un signe qui ne trompe pas la propagande visuelle : l’affiche de propagande est de retour à chaque fêtes (Nouvel an, 9 novembre) on revoit dans tous les magasins des reproductions d’affiches patriotiques qui datent toutes de la période stalinienne. Affiches mises en place par la Procuratura, c’est-à-dire par l’État. L’affichage en est obligatoire sous peine d’amende. J’ai même noté cette année une nouvelle affiche de propagande pour que les parents s’occupent de leurs enfants.

On semble assister à un double mouvement, tout d’abord une vaste entreprise de séduction en direction des pays occidentaux, sur le terrain de la politique extérieure (participation à la coalition antiterroriste), militaire (ouverture de l’espace aérien) et économique (appel aux investissements étrangers). De l’autre côté, la politique intérieure se referme. Ce double mouvement d’ouverture à l’extérieur et de fermeture à l’intérieur n’est pas sans rappeler le modèle chinois actuel.

Jean Raymond Moscou


No Pasaran 21ter rue Voltaire 75011 Paris - Tél. 06 11 29 02 15 - nopasaran@samizdat.net
Ce site est réalisé avec SPIP logiciel libre sous license GNU/GPL - Hébergé par Samizdat.net