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AccueilJournalNuméros parus en 2002N°6 - Février 2002 > Les genres : une différence culturelle

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Les genres : une différence culturelle


Christine Delphy est sociologue, cofondatrice de la revue Questions féministes et directrice de Nouvelles Questions féministes. L’Ennemi principal, un ensemble important de ses articles datant de 1978 à 1996, a été édité en deux parties : Economie politique du patriarcat et Penser le genre (1). Adoptant la démarche du constructivisme social, elle a montré comment le travail gratuit des femmes dans les foyers est un des piliers du patriarcat, avant de mettre au jour les structures qui permettent la domination masculine, notamment celle du genre. Dans un entretien autour de Penser le genre, elle met à bas les préjugés naturalistes en expliquant que la séparation de l’humanité en deux catégories, hommes et femmes, est un fait culturel, comme la famille, le statut des enfants ou les "races". Et rappelle une chose essentielle "c’est nous qui faisons le monde dans lequel nous évoluons".


Le débat entre nature et culture est transversal à toute ton analyse dans Penser le genre où le constructivisme social s’oppose à la question du naturalisme. Quels sont les enjeux de ce débat ?

Ch. Delphy : L’enjeu est absolument énorme. On voit resurgir le naturalisme (ou essentialisme) à propos de la domination de tous les groupes, par exemple d’une soi-disant "race" par une autre. Les théories "racialistes" sont des théories naturalistes qui expliquent la position sociale de certains groupes de personnes par leur constitution physique d’où déboucheraient des aptitudes ou des inaptitudes. On le voit dans le cas des enfants, qui sont réputés incapables de se gouverner eux-mêmes et on le voit dans l’oppression des femmes. Ce naturalisme, d’une façon plus subtile, imprègne notre pensée. Pour toute situation sociale, nous cherchons toujours des raisons de nature. Par exemple dans les questions de conflits, même si on n’entend pas parler de différence d’un groupe ou d’un autre, on entend beaucoup parler de la "nature humaine". Même les gens de gauche diront "avec la nature humaine, il y aura toujours des guerres". À mon sens, la sociologie et l’ensemble des sciences sociales devraient être fondés sur une répudiation totale de cette notion de "nature humaine".

Tu expliques que même s’il y a un certain nombre de choses universelles, il y a toujours une couche de culturel par dessus. Et parler d’humain pré-social, asocial n’a pas de sens.

Parler d’être humain en dehors de la société n’a pas de sens, on le sait très bien, puisque les quelques enfants sauvages qu’on a trouvés, n’avaient rien d’humain. Si les êtres humains ont une spécificité (encore que ça se discute de savoir s’il y a une coupure absolue entre les primates les plus évolués et nous), c’est le fait qu’ils n’ont pas d’instinct, de conduite préprogrammée. En dehors des limites propres qui sont celles de leurs physiques, leur comportement est entièrement acquis, et acquis dans l’interaction. À quel moment ça s’est fait ? C’est une fausse question. La culture se fait tout le temps. On pourrait dire que la culture est l’humanité des êtres humains.

Tu te positionnes vraiment par rapport au constructivisme social. Peux-tu nous expliquer plus précisément cette approche ?

Le constructivisme est un terme utilisé dans les sciences sociales pour dénoter un type de démarche qui s’oppose aux approches essentialistes qui disent : d’abord on a des êtres humains qui sont comme ça et la culture en découle. C’est un peu la différence entre la psychanalyse et la sociologie. La psychanalyse dit : "les gens sont ainsi et ne peuvent pas être autrement, parce qu’il y a des expériences universelles de l’être humain". Par exemple, la différence des sexes physique induit certains comportements : les êtres humains sont forcés d’être dans une famille qu’on ne peut pas imaginer autrement qu’avec papa-maman-bébé, et cette interaction ne peut pas se dérouler autrement que comme ils disent et ne peut pas produire certains effets, etc. Une bonne partie des sociologues et des anthropologues disent que tout ça, le type de famille et d’éducation des enfants, dépend du type de culture, et on ne peut pas parler si vite de caractéristiques universelles. La différence entre les deux approches se situe à l’endroit où l’on fait remonter la culture. Dans le cas du constructivisme extrême ou radical, qui est le mien, il faut oublier toute notion de nature humaine, penser qu’absolument tout ce qu’on fait et tout ce qu’on est est culturel. Et par culturel, j’entends social, puisque la culture est toujours le fruit d’une interaction. Quelqu’un ne peut pas être cultivé tout seul. Les enfants sauvages n’avaient pas de culture.

Venons-en à la question du genre. Aux Etats-Unis et en Allemagne, on trouve à l’université les gender studies, en France c’est moins courant. Qu’est-ce que l’acception classique du genre ?

C’est un peu difficile de parler d’acception classique parce que le genre est quand même un concept très nouveau. C’est d’abord un mot récent. "Genre" en anglais comme en français désigne au départ le genre grammatical. Il a été détourné de son sens classique par des chercheuses américaines en études féministes pour signifier, précisément, la partie culturelle des différences entre les sexes. La grande précurseure de tout ça est Simone de Beauvoir. Son analyse constructiviste est ramassée dans la phrase célèbre "On ne naît pas femme, on le devient". Dans son esprit, "on le devient" était un constat pas heureux, elle ne pensait pas qu’il "fallait" devenir une femme. Cette formule portait déjà en germe la notion du genre. La personne qui l’a explicitée la première dans un livre était une Anglaise appelée Ann Oakley, avec Sex and gender en 1972. Elle disait qu’il y a le sexe biologique, et pour elle il n’y a pas de doute que ça fait bien deux catégories d’êtres humains, mais ensuite elle regardait comment les rôles de sexes variaient suivant les sociétés. Elle disait que ce qui est variable est le genre. Le sexe en somme est une constante, un trait physique, et dessus se posent des rôles attribués à chacune des catégories humaines définies par leur caractéristique physique sexuelle. Il n’y a donc pas de définition classique mais une espèce d’accord sur le fait qu’il y a un ensemble de choses variables suivant les sociétés, qui ne sont pas naturelles et donc construites. On trace une limite entre le genre et le sexe. Ensuite les gens ne sont pas tout à fait d’accord sur où l’on met cette limite.

Le genre peut être vu comme un carcan social apposé sur le sexe biologique. Un carcan qui regroupe les traits qu’on entend tous les jours et qu’on nous serine depuis qu’on est petits : que les petits garçons sont plus bagarreurs, les petites filles plus douces, etc.

Oui, mais ce n’est pas seulement les stéréotypes, c’est aussi la façon dont on traite les uns et les autres, la division du travail effectif, les métiers pour hommes, les métiers pour femmes, la hiérarchie surtout. Quand on parle des différences, la grande différence qu’on oublie de dire, c’est quand on est tout petit et qu’on soit une petite fille ou un petit garçon, on comprend qu’il y a du féminin et du masculin, mais aussi que le masculin est bien plus noble et enviable et, finalement, supérieur. Ces attitudes n’ont pas besoin d’être intériorisées : l’intériorisation implique qu’il y aurait un être humain déjà formé qui ensuite avalerait une "potion culturelle" qui lui serait extérieure. Ce n’est pas vrai. Si on reprend cette analogie, on peut dire qu’il n’y a pas de différence entre la bouche qui avale et le verre. L’avalement constitue la bouche elle-même. L’enfant est constitué par la façon dont lui-même est traité dès le début de sa vie. Ces stéréotypes ne sont pas rajoutés dans son repas, ils vont être imbibés par tous les pores. Ce n’est pas seulement ce qu’on va lui dire, mais ce qu’il vit, ce qu’il sent, où on le place (dans la rue, la maison, sur tel siège), comment on lui parle, etc. Il faut voir ça comme un ensemble, et ne pas croire que l’interaction sociale s’arrête à la parole.

Le propos de Penser le genre est de débusquer cette idéologie du genre qui est la pierre d’achoppement de la domination masculine, dans un certain nombre de lieux sociaux, d’endroits où ils peuvent se véhiculer.

La construction des genres est à l’œuvre partout : l’Etat, la famille, le travail, le capitalisme, jusqu’au niveau le plus apparemment informel. Par exemple, des conversations, des rencontres dans la rue, des petits gestes, des façons de se conduire, la façon de prendre sa cuillère, de regarder quelqu’un, de parler, de ne pas parler. Une construction sociale, c’est quelque chose qui est social donc qui n’est pas surimposé sur un état naturel, d’une part, et d’autre part qui traverse tous les niveaux de la société.

Tu parles du côté culturel de la filiation et tu rattaches ça à un certain nombre de conventions culturelles qui en découlent et qui passent pour naturelles, comme la propriété des enfants, comme le droit public et le droit privé…

J’ai parlé de la revendication maternelle, qui est la reconstruction par certaines féministes, heureusement pas très nombreuses, d’un mythe des origines, parallèle au mythe patriarcal des origines. Ce mythe cherche à donner à un genre, c’est-à-dire à un groupe, les hommes ou les femmes, la responsabilité, et finalement la gloire, d’avoir inventé la culture. Dans le cadre des reconstructions patriarcales les femmes en sont totalement absentes. On le voit dans les émissions de vulgarisation sur la préhistoire : on parle de l’Homme de Neandertal, de l’Homme de Cro-Magnon, l’homme faisait des outils, chassait des animaux. Et dans les représentations visuelles il n’y a jamais de femmes, et il est très clair que pour les préhistoriens seuls les mâles étaient actifs. Dans les reconstructions féministes qui essaient de s’opposer à ça, il y a un côté un peu caricatural car elles sont symétriques : ce sont les femmes qui font toute la culture et qui sont responsables de la civilisation. Pourquoi ? Parce qu’elles auraient une responsabilité par rapport aux jeunes de l’espèce, en raison du fait qu’elles donnent naissance physiquement aux petits. Avec la notion que le lien de filiation est fait par un événement physique. Or, c’est quelque chose de complètement antiscientifique. Le lien de filiation entre un enfant et des parents, quels qu’ils soient, est toujours social. On s’en aperçoit car les méthodes de filiation diffèrent d’une société à l’autre. Ce sont des conventions qui font que le jeune de l’espèce est rattaché à son groupe et jamais des raisons biologiques. J’ai ensuite examiné, entre autres choses, le statut des enfants comme un exemple qui montre comment la dichotomie utilisée classiquement pour expliquer l’espace public et l’espace privé, était elle-même une construction sociale. En effet, très souvent on dit : voilà, les choses sont ainsi parce que cela se passe dans le public et ceci dans le privé. Comme si le monde naturel nous était livré avec des pancartes qui disaient déjà "Ici vous êtes dans le public", "Ici vous êtes dans le privé". Évidemment, ça ne se passe pas ainsi, puisque c’est nous qui faisons le monde dans lequel nous évoluons et que privé et public sont des mots désignant des espaces sociaux et justement pas des espaces physiques. J’ai essayé de montrer que le privé se constitue comme un endroit où règnent certaines relations sociales. Et l’endroit clef du privé, c’est la famille. Or la famille n’est pas un lieu naturel, contrairement à ce qu’on essaye de nous dire. La famille, dans notre conception de la société, a un statut particulier. Une des phrases qu’on entend répéter depuis des centaines d’années et à chaque fois qu’il y a une conférence du gouvernement sur la famille : "La famille est la cellule de base de la société". Avec cette analogie finalement biologique : le corps est constitué de cellules, la société est constituée de cellules, le parti communiste aussi est constitué de cellules… En s’additionnant, toutes ces cellules forment des membres qui en les additionnant donnent aussi des corps. Or, cette vision par addition de petites cellules de base qui formeraient la société est complètement fausse. Il n’y a jamais eu de cellules de base composées de papa-maman-bébé qui parcouraient la savane et qui s’agglutinaient pour former de plus gros groupes qui eux-même se rassemblaient pour former des sociétés. Cette vision, dès qu’on la regarde un petit peu, n’a strictement aucun sens. On ne peut pas imaginer une famille qui serait toute seule, pas plus qu’un individu qui serait tout seul. Il faut partir en réalité de l’ensemble de la société et considérer que les cellules plus petites sont formées par cette société. C’est ce que j’appelle la démarche holiste, qui part du tout au lieu de partir de chacune des parties. Le privé est une construction sociale : la société découpe des parties dans son fonctionnement et fait une grande division entre ce qu’elle appelle, d’une part, le privé et, d’autre part, le public. Ce qu’elle appelle le privé est le fonctionnement de cette institution qu’elle nomme la famille. Notre société, et d’autres sociétés occidentales, disent que la famille est une cellule de base à la fois naturelle et sociale. C’est la "base" de la société et en même temps elle est considérée comme une institution non sociale, naturelle. En fait, la société en a fait quelque chose par le droit, en l’excluant des règles de fonctionnement appliquées au public et en lui donnant d’autres règles. Pour résumer, la famille n’est nullement quelque chose de naturel, c’est un type de relation, de groupe auquel s’appliquent des règles différentes de celles qui sont appliquées par l’ensemble de la société, codifiées dans le droit, et soutenues par toutes les institutions de la société. Il n’y a pas une espèce de fonctionnement anarchique de la famille qui se trouverait en dehors de la société : des policiers, des juges, des assistantes sociales, des travailleurs sociaux, des écoles, des professeurs… disent quelles sont les bonnes relations familiales. Ces relations familiales sont définies par le fait qu’elles sont censées être différentes des relations hors de la famille. Et c’est nous, l’ensemble de la société, qui les rendons différentes.

Le fait que la cellule familiale soit exclue du droit public, a deux conséquences : le fait que les enfants soient une propriété des parents et d’autre part des conséquences au niveau des violences conjugales.

Quand on parle de la famille, ou des femmes ou de n’importe quelle autre catégorie, je pense qu’il faut laisser de côté le fait qu’on a un groupe préconstitué, et qu’ensuite des pratiques s’appliquent à lui. Par exemple, il y a des règles qui s’appliquent aux enfants. Je dirais que les enfants sont d’abord des gens à qui s’appliquent ces règles-là, et ces règles les rendent enfants. Qu’est-ce qu’un enfant ? C’est, entre autres choses, quelqu’un qui va à l’école et qui appartient à des parents. Ensuite, on peut le rationaliser en disant : "il faut que ce soit comme ça, parce qu’un enfant n’a pas suffisamment de compétences, etc.". Mais il est d’abord défini par toutes les interdictions et les contraintes qui s’appliquent à lui et par le fait qu’il est un mineur. Et si on regarde le sens de "mineur", cela signifie tout simplement : qui n’est pas un sujet de droit. Les enfants ne sont pas des citoyens, c’est la première chose qui les définit. Ils n’ont pas droit aux protections usuelles de la loi.

Tu mets ça en parallèle avec des chiffres qui apparaissent stupéfiants, mais que tu cites de façon claire : deux enfants morts par jour dans les foyers en France.

Ces chiffres datent du moment où j’ai écrit l’article, je ne mentionnais que des chiffres très approximatifs donnés par des associations de défense des enfants et qui concernaient les maltraitances résultant en des décès. Aujourd’hui, les chiffres des violences contre les enfants, tout confondu, sont bien plus considérables. On parle d’un nombre de cas de maltraitance énorme. Justement, c’est un domaine sur lequel on n’a pas de données parce que c’est encore complètement tabou. Les violences sur les enfants sont aussi taboues que l’étaient les violences dites "domestiques", c’est-à-dire les violences des hommes contres les femmes dans les familles. On peut dire que depuis ces trois dernières années, un petit peu du voile s’est levé sur les violences faites aux enfants surtout par les gens extérieurs à la famille, les cas de violences sexuelles qu’on appelle la pédophilie (on parle de pédophilie quand il s’agit de gens qui ne sont pas des parents de l’enfant). Mais ce que les féministes appellent les violences par inceste sont encore la partie la moins étudiée de ça.

Tu vas très loin en disant, statistiques à l’appui, que l’endroit le plus dangereux pour les enfants n’est pas, comme on veut le faire croire, les inconnus qu’ils pourraient croiser dans la rue, mais le foyer.

C’est sûr que les gens sont absolument bouleversés, on le voit, quand il y a des disparitions et des crimes sur les enfants. Mais les cas d’abus sexuels et de crimes, sexuels ou non, faits par des gens qui ne font pas partie de la famille sont beaucoup plus rares que les mêmes choses faites par les parents.

Dans ton analyse, une autre conséquence de la construction sociale des sphères du public et du privé, est celle des violences des hommes sur les femmes.

Par rapport aux violences conjugales, il est question du droit de la famille, ou plutôt du fait que l’entrée dans des relations familiales (ce qui ne veut pas dire dans un lieu physique comme l’appartement où vit la famille) fait que les règles du public sont suspendues. Je donne un exemple très simple : si on voit dans la rue un homme gifler une femme, généralement, des gens vont s’interposer après un temps d’arrêt, le temps de savoir s’il y a des relations de type marital entre eux. Et il suffit que l’homme dise "c’est ma femme" pour que tout le monde s’arrête comme s’il avait le droit de le faire. Donc, la question n’est pas l’endroit où ça se passe puisque ça peut se passer dans un endroit public, mais le type de relation. On s’aperçoit que la relation qu’ils ont est sanctionnée par la société, pas seulement par le droit mais aussi par les passants qui respectent la règle de non-violence entre les gens, l’interdiction de frapper autrui, mais cette règle n’existe plus dès lors que les gens ont des relations conjugales. Au sens de lieu sociologique, la famille est un endroit où le droit commun qui régit les rapports de tout le monde avec tout le monde est suspendu et où un autre droit s’applique.

Pour en revenir à la différence des sexes, tu dis en fait qu’il n’y a pas plus de pertinence à diviser les gens entre hommes et femmes, en fonction de leurs organes sexuels qu’en fonction de leurs yeux, bleus ou marrons. C’est juste le social qui par-dessus crée cette différence-là en disant que c’est une différence importante.

Le social les crée comme différences justement parce qu’il a créé la différence comme significative. À partir du moment où vous dites que les yeux sont importants, leur forme, leur couleur vont devenir très importantes, mais il faut déjà que vous soyez focalisé sur les yeux, parce qu’ils vont être votre critère de différenciation entre les gens. Ou les oreilles, vous allez avoir différentes oreilles, mais qui vont apparaître à tout le monde, les gens vont se dire mais ce n’est pas possible qu’on ne le voit pas, et qu’on n’appelle pas quelqu’un "oreille à petit lobe" ou "oreille à grand lobe". Les genres sont tellement évidents pour les gens, que l’idée d’une société sans genre leur semble impossible. Parce qu’ils ne peuvent pas s’imaginer qu’on ne remarque pas ces différences. Ou alors ils pensent qu’on veut une société sans sexe, en particulier les garçons qui pensent qu’une société où les catégories de genres seraient abolies, cela veut dire qu’ils allaient être castrés, mais pas du tout. Ils ou elles sont tellement à l’intérieur de la société qu’ils sont incapables de prendre un recul, de s’imaginer une société où on ne se demanderait pas si les gens sont d’un sexe ou d’un autre, on remarquerait que, comme tout le monde, ils ont des organes sexuels.

Tu dis que le but des féministes radicales est d’éliminer les catégories de sexes.

Oui, parce que les catégories de sexes découlent des catégories de genre. Ces catégories n’existeraient pas s’il n’y avait pas une oppression. Ce sont des catégories de l’oppression comme les catégories raciales : il n’y aurait pas de Noirs et de Blancs, s’ils n’y avaient pas eu la colonisation, l’esclavage et s’il n’y avait pas aujourd’hui l’exploitation.

Propos recueillis par Pirouli et mis en forme par Leila.

(1) L’Ennemi principal, éd. Syllepse, tome 1 : L’économie politique du patriarcat, (1999) ; tome 2 : Penser le genre (2001)


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