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AccueilJournalNuméros parus en 2001N°88 - Juin 2001
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Dernières nouvelles de Russie


Le 20 avril, anniversaire de la naissance d’Hitler a été célébré à Moscou de la pire manière qui soit par l’assassinat d’un jeune Tchétchène. Un groupe de skinheads s’est attaqué samedi 21 avril à un groupe de jeunes tchétchènes en plein centre de Moscou place du Manège aux portes du Kremlin. L’un d’entre eux âgés de 18 ans a été mortellement frappé de deux coup de couteau à la poitrine. Les skinheads se sont enfuis mais l’un deux a été rattrapé et retenu jusqu’à l’arrivée de la police. Le meurtrier aurait été identifié et il s’agirait d’un jeune de 17 ans, Alexander Zolotukhin.


Vendredi 20 avril près de 150 skinheads ont attaqué, en fin d’après midi, un marché dans le sud de Moscou, hurlant des slogans racistes ils ont battus plusieurs commerçants azéris avant que la police intervienne. Près d’une dizaine de commerçants ont du être hospitalisés. La police détient 53 suspects après cette attaque, la plupart des jeunes ayant de 13 à 17 ans. Parmi les personnes arrêtées on comptait aussi le n°2 du journal nationaliste Russky Khozyain (le Maître russe). Le quotidien Kommersant a qualifié l’attaque de réel pogrom. Le 8 avril c’est une cinquantaine de skinheads qui à la Station "Moteur d’avion" se sont attaqués à des étudiants de l’Université d’électricité. La police arrivée sur place a volé au secours des skinheads et s’est mise à frapper les étudiants. Le lendemain les étudiants ont organisé une manifestation.

Des représentants du Ministère de l’Intérieur et de la police locale ont rencontré les représentants de l’Université pour discuter du problème.

Si le mois d’avril est toujours le mois le plus meurtrier pour les actes racistes, les agressions sont quotidiennes. Les étudiants étrangers d’origine africaine et asiatique sont souvent la cible des skinheads bien sûr mais surtout de racistes ordinaires. Dans certaines villes comme Voronej, où les néo-nazis du RNE (Union nationale russe) sont très actifs, les étudiants ne quittent leur campus qu’en groupe, ne font leur course qu’accompagnés d’une dizaine de leurs camarades. Récemment les étudiants chinois ont demandé le remboursement de leur scolarité à l’Université pour quitter la ville.

Les autorités largement passives quand elles ne sont pas complices dans certains cas semblent pour certaines se rendre compte de la situation.

Ainsi lundi 23 avril, le président Vladimir Poutine lors d’une réunion de son cabinet a ordonné à la police de prendre des mesures pour protéger les minorités. Parlant de l’augmentation des attaques racistes, Poutine aurait déclaré selon l’agence de presse Itar-Tass "Pour la Russie, qui est un pays multiculturel, ces actes sont inacceptables". Selon les organisations des droits de l’homme, les attaques racistes sont en effet en train d’augmenter et les skinheads russes en sont de plus en plus responsables. Certaines en compte entre 3 et 4 par semaine, le président de l’Association des Étudiants de Russie en a comptabilisé déjà 11 pour le seul mois d’avril.

Edouard Limonov, le poète leader du groupe ultranationaliste National Bolshevik Party a été arrêté le 7 avril dans l’Altaï. Il est accusé d’avoir voulu acheter des armes. Lors de la fouille de sa demeure la police a saisi près de 10 000 dollars, mais Limonov se défend en parlant d’avance sur un livre à écrire sur le tycoon de l’aluminium de Krasnoyarsk Anatoly Bykov. Le FSB, les services spéciaux russes l’ont néanmoins accusé de participation dans l’achat illégal d’armes. Cette affaire semble liée à l’arrestation de trois membres de son parti à Samara et Ufa au moment où ils essayaient d’acheter des pistolets au mois de mars. Limonov déclara n’avoir jamais rencontré ces trois personnes et lia cette affaire au procès de quatre membres du NBP pour une attaque en novembre 2000 de la cathédrale St Pierre à Riga.

Plusieurs membres du parti de Limonov ont été arrêtés dont Sergeï Aksyonov éditeur du journal Limonka, (la Grenade) organe du NBP.

Eduard Limonov a une longue carrière derrière lui, il fut expulsé d’Union soviétique dans les années 1970 et trouva refuge en France, auprès des milieux d’extrême gauche. Dans les années 1990, il se reconvertit en politique et dirige le Parti National Bolchevik qui obtient un petit succès d’audience. Ses membres sans être très nombreux sont présents dans la rue, participant aux manifestations du Premier Mai ou à celles de l’anniversaire de la Révolution d’octobre. Les cortèges rassemblent moins d’une centaine de membres à St-Petersbourg et un peu plus à Moscou. Cette année pour le premier mai, ils étaient près de 80 derrière un immense drapeau ressemblant au drapeau nazi mais à la place de la croix gammée on trouvait la faucille et le marteau. ils defilaient en queue de manifestation et leur présence n’importunait nullement les manifestants communistes. Il est vrai que souvent ces derniers partagent de nombreuses idées, dont l’antisémitisme, le nationalisme, le militarisme et l’idée d’empire. Le type de jeunes qui y participent ressemble plus à ceux qui participent aux manifestations d’extrême gauche (cheveux longs, iroquois de couleurs) qu’à ceux des autres cortèges d’extrême droite. L’ambiguïté est aussi politique en idéalisant des figures de l’extrême gauche comme Che Guevara.

Jirinovsky s’est encore une fois de plus distingué à la Douma à l’occasion de la journée d’hommage aux victimes de l’Holocauste nazi. Il déclara que les 6 millions de Juifs exterminés par les Nazis ne méritaient pas plus de respect que les 30 millions (! !) de Russes tués pendant la Deuxième Guerre Mondiale pour qui il n’y a pas de journée spéciale du souvenir. Au moment de la minute de silence Jirinovski appela sans grand succès les membres de l’Assemblée à rester assis.

Malgré ses frasques diverses, Jirinovski continue de jouer un rôle politique supérieur à ses scores électoraux, il reste considéré par beaucoup comme un allié utile du Kremlin. Cela a été confirmé par le fait que le président Poutine l’a décoré récemment.

Le mois de mai est celui des manifestations à Moscou, d’abord celle du 1er mai qui a vu défiler près de 10 000 communistes de la statue de Lénine à celle de Marx. Tous les chefs staliniens étaient présents de Ziouganov du KPRF à Anpilov de la "Russie au travail", le cortège n’était pas plus jeune que l’année dernière sauf dans les rangs des nouveaux Komsomols et chez les néos-nazis. En effet comme l’année dernière les partisans du NBP, parti national bolchevique manifestaient en queue de cortège avec un drapeau rouge dont le centre évidé et blanc comporte une faucille et un marteau. Le 9 mai les anciens combattants défilaient, avec les communistes et toutes les Unions d’officiers, organisations nationalistes réactionnaires et communisantes. À la fin de la manifestation un dernier cortège portait des icônes et des bannières ultra-orthodoxes, il s’agissait d’une organisation nationaliste et tsariste qui réclame entre autres l’adoption d’un vieux drapeau allemand comme emblème national.

Jean Raymond à Moscou


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