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> N°88 - Juin 2001
(ancienne formule) > Interview de Télé Bocal |
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Interview de Télé BocalAlors que la TV montre donne de plus en plus envie d’utiliser une télécommande universelle, le marteau, certain(e)s continuent à résister avec de petit moyen et se regroupent lors de projections dans des bars, mais aussi sur Paris sur le canal 36 pour une nouvelle autorisation temporaire de 6 mois. Rencontre avec Richard et Muriel, deux permanents de TV Bocal.
Peux-tu nous présenter TV Bocal et son projet ? Muriel : Télé Bocal est une télévision associative crée en 1995. Elle a plusieurs objectifs : Créer une télévision différente c’est-à-dire montrer qu’il n’existe pas une seule sorte de télévision (commerciale), prouver au public que la télévision n’est pas une fenêtre sacrée réservée à quelques uns. Enfin, bref, créer une télévision à la portée de tous, que chacun (et chacune) puisse investir et utiliser. Donner la parole à ceux qui ne l’ont pas habituellement (aux immigrés, aux chômeurs, aux SDF, aux personnes de couleurs, à monsieur et madame tout le monde). Enfin, faire en sorte que tout le monde soit vu et représenté (pas comme sur les chaînes commerciales où on a pas droit à la parole si on s’exprime mal et qu’on est trop bronzé ou un peu coloré...). Restaurer le lien social. Parce que les diffusions dans les bars sont l’occasion pour les gens de se rencontrer, d’entrer en contact les uns avec les autres... Les diffusions sont des lieux d’échanges et permettent de sortir à moindre coût, pour aller voir la télé comme on y irait à un spectacle... Et puis, notre objectif est aussi de donner envie aux spectateurs de s’investir dans la vie de leur quartier, pourquoi pas en participant à la vie de Télé Bocal. Comment on réagit les autres TV ? Richard :Les chaînes de télévision classique sont assez amusées du fait qu’une petite chaîne comme la notre puisse être autorisée, ils considèrent que nous ne sommes évidement pas en concurrence puisse que nous traitons l’actu de proximité. Murielle : Au niveau côté télé associatives, on est 7 à se partager le même canal... Comment faites-vous pour garder une liberté d’image et financière ? Murielle : Côté finances, c’est dur... On vit grâce à nos adhérents, aux diffusions qu’on fait dans les bars, aux ventes d’images (on a un reportage de 3 minutes qui est diffusé chaque semaine sur France 3 Ile-de-France), aux quelques prestations qu’on fait (par ex, on a filmé les rencontres urbaines de la Villette) et puis on a eu une subvention du Ministère de l’Economie solidaire, on participe à quelques concours... Et, plein de gens participent, aident de différentes manières (en réalisant des fictions ou des reportages, en jouant dans les fictions, en allant installer des télés dans les bars...). On diffuse ce qu’on veut puisque, de toutes façons, il n’y a pas de censure "préventive" du CSA, il ne sanctionne que a posteriori... On a tout de même une sorte de ligne de conduite : on visionne ce qu’on nous apporte de façon à ne pas diffuser n’importe quoi... Et puis, pour nos propres productions, on visionne en groupe et on regarde ce qui peut choquer pour éventuellement faire des coupes... Richard :Pour ce qui est de la liberté d’expression personne ne nous à jamais intenté un procès pour diffamation et parce que nous n’avons pas la visibilité d’une grande chaîne alors nous ne risquons pas grand chose. Vous cherchez à faire parler tous et toutes, mais face à la caméra, les gens restent-ils eux mêmes ? Murielle : C’est, en effet, une bonne question. Enfin, disons, que les gens qu’on interroge (pour les micro-trottoirs, par exemple) ne sont pas des personnes publiques donc ils n’ont pas de discours tout fait... Pour les actus, dans les manifs, ce ne sont pas les gens connus qu’on cherche à faire parler (et qui vont ressortir le discours qu’ils ont appris) mais des lambda qui sont là, pour soutenir la cause ou même qui passent là par hasard. Bref, pas de mise en scène mais le plus de spontanéité possible. Richard : Evidement que les gens que nous filmons sont pas toujours à l’aise devant la caméra mais nous avons l’avantage de tourner avec de très petites caméras que les gens oublient très vite. Vous nous expliquez que TV Bocal "propose une autre façon de regarder la TV, que les programmes se voient en groupe, entre amis autour d’un verre" et pourtant à partir du 1er Mai, vous retrouvez une nouvelle autorisation temporaire sur les ondes. N’est-ce pas changer ces objectifs ? Aller contre vos anciennes idées ? Richard : Pour ce qui est du projet hertzien de télé BOCAL, il nous met nullement en concurrence et n’est pas non plus contradictoire avec les diffusions dans les bars car de toutes les manière nous continuerons à diffuser dans les lieux public car c’est notre vraie raisons d’être mais tu comprends bien que beaucoup de gens ne sortent jamais de chez eux et s’est pour eux que nous allons diffuser et si, par cette diffusion nous pouvons alors leurs redonner envie de participer à la vie culturel et politique de leur quartier, je pense que sa en vaut la peine et rassures-toi nous ne perdrons pas notre âme ! Murielle : Et puis, c’est aussi, l’occasion pour nous de faire des reportages plus longs (genre 20 minutes d’actu alors que dans les bars on est limité à 3-4 minutes) et puis de passer diverses réalisations que les gens nous apportent Et si la semaine sans la TV, qui était du 22 au 28 avril, avait été après votre mise à l’antenne, comment auriez-vous réagi ? Murielle :Là, je pense que chaque membre de Bocal aura sa réponse... Pour ma part, je dirais que je ne vois pas trop l’intérêt d’une semaine sans télé imposée... Ce que je veux dire, c’est que j’ai un peu l’impression que c’est une connerie de plus qu’on cherche à nous imposer comme la journée de la femme, la fête de la bière ou l’obligation qu’on a de faire des cadeaux à Noël... Je sais pas, je pense qu’on est libre. Et, si on veut regarder la télé même pendant la "Semaine sans télé", on doit pouvoir le faire. Et, on a pas besoin d’avoir une "Semaine sans télé" pour ne pas allumer son poste. Personnellement, ma télé est tombée en panne la semaine dernière et, maintenant, je ne reçois plus aucune chaîne correctement. Peut-être que mon téléviseur a voulu se révolter et soutenir ses camarades pour la Semaine sans télé... mais, ça ne me manque pas vraiment... Bon, bref, ce que je voulais dire c’est que ça m’énerve que des gens veuillent nous imposer un truc de plus, à une date précise... On doit souhaiter une bonne fête à nos parents à une certaine date, offrir un cadeau à son amoureux à une autre... C’est bon, quoi ! On devrait le faire quand on en a envie et pas à date fixe. Et, pour laisser son poste éteint, ça devrait être pareil. Et, de toutes façons, on a diffusé nos programmes... A chacun de choisir s’il veut les regarder ou pas ! Face au voyeurisme télévisuel, qui soit disant montre le quotidien, comment réagissez-vous alors que vos programmes se construisent autour de ce dernier ? Murielle : Je pense qu’il y a une différence entre voyeurisme et filmer le quotidien...C’est pas pareil de filmer 12 personnes dans un loft (exemple pris totalement au hasard !!!) et faire un micro-trot’ sur un marché ou dans la rue... Richard : En ce qui concerne "le voyeurisme télévisuel" c’est un angle qui ne nous intéresse pas car beaucoup de gens vivent dans une détresse totale et le caractère d’urgence de leurs situation nous oblige à aller vers eux, le reste est pour nous superficiel. Une multitude de TV asso. font leur apparition, se regroupent (avec la Coordination Permanente des Médias Libres par exemple). Au delà de Bocal, que penses-tu de ces arrivées (comme celle de ZaléaTV par exemple) ? Que peuvent-elles apporter au petit écran ? Mu : Télé Bocal fait partie de la CPML. Chaque télévision est différente et c’est ce qui est intéressant... Non à l’uniformité ! A chacun son concept ! Richard : Effectivement, plus il y aura de chaînes comme la notre et plus nous verrons la télé se démocratisée car aujourd’hui la télé ne montre qu’une toute petite représentation de la population, les minorités ni sont presque jamais. Comment réagissez-vous à la comparaison "les TV asso, aujourd’hui, c’est les radios asso avant 1981" ? Murielle : Je suis assez d’accord avec cette comparaison dans la mesure où on est dans une situation presque similaire. 1981, l’explosion des télévisions libres, la création de la "libre antenne", tout ça, c’était bien... Chacun pouvait dire ce qu’il voulait, créer sa petite radio. Le problème, c’est qu’aujourd’hui ces radios n’existent plus. Elles ont toutes (ou presque) étaient rachetés par de grands groupes parce qu’elles n’étaient malheureusement pas viables financièrement. Il nous reste à espérer que les télévisions associatives ne subiront pas le même sort. Richard : Moi, je pense que nous sommes pas tout à fait dans le cas de figure de 1981 avec les radios libres, car étant beaucoup plus coûteuse la télé reste plus difficile à réaliser mais s’est la mêmevolonté de désacralisé ce média afin de le populariser. Propos recueillis par Eric (Brest) Actuellement, TV Bocal est projeté à Paris, Montpellier et Brest mais est ouvert à toute proposition de lieu de projection (squat, café, maison de retraite...). Pour contacter Bocal : 01.43.48.02.08 www.telebocal.com |
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