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AccueilJournalNuméros parus en 2002N°13 - Octobre 2002 > Terreur contre les pauvres

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Terreur contre les pauvres


L’ordre sécuritaire est en marche, une marche toujours plus guerrière et toujours plus sûre d’elle même. Dans la stricte continuité de la Loi de Sécurité Quotidienne votée sous le gouvernement de la gauche poubelle l’année dernière, des arrêtés anti-mendicité entrés en vigueur dans certaines communes, et de la loi Perben sur la justice des mineurs, le tout nouveau " document de travail " sur la Sécurité Intérieure concoctée par Sarkozy nous en fait une nouvelle fois la démonstration.


Véritable pierre angulaire d’une politique de renforcement exponentiel du tout sécuritaire, cet avant projet de loi vise à formaliser les bases juridiques d’une guerre sociale menée contre les nouvelles " classes dangereuses ". La canaille, les vauriens, les sauvageons et improductifs de toutes sortes n’ont qu’à bien se tenir. Derrière une prétendue " lutte contre l’insécurité " que toutes les forces réactionnaires et capitalistes (de droite et de gauche) présentent comme la nouvelle priorité nationale, s’enracinent en fait un traitement policier de la misère et une stratégie de criminalisation de la pauvreté. Petit florilège répressif.

- Mendiants : le texte prévoit de remettre au goût du jour le délit de mendicité ­ supprimé en théorie depuis 1994 ­ par l’instauration d’une peine de 6 mois de prison ferme et de 7500 euros d’amende. Derrière la prétention de ne cibler que " certaines formes de mendicité ", et notamment celles considérées comme " agressives ", se cache une répression extrêmement large amenée à renforcer le harcèlement policier envers toute personne vivant dans la rue.

- Prostituées et étrangers : le racolage sur la voie publique, allant de la simple présence à l’incitation " active " devient un délit passible de 6 mois de prison ferme et de 7500 euros d’amende. Les prostituées étrangères les plus prolétarisées seront particulièrement visées par cette politique, puisque leur titre de séjour pourra leur être retiré.

Plus largement, l’offensive contre les étrangers se renforce : la reconduite à la frontière est prévue pour les personnes accusés de troubler l’ordre public. La double peine est donc susceptible d’être élargie : elle concerne désormais la participation à une manifestation, à une bagarre ou le tapage nocturne.

- Jeunes et squatters : dans la continuité de la Loi de Sécurité Quotidienne votée sous le gouvernement Jospin, les regroupements dans les halls d’immeuble seront punis de 6 mois de prison ferme et de 7500 euros d’amende.

Contre l’absentéisme scolaire, la création d’un nouveau délit permettra d’infliger 2000 euros d’amende aux parents irresponsables qui laissent traîner leurs mômes.

En intégrant leurs occupations dans la catégorie d’infraction de violation de propriété privée, le texte prévoit de réprimer les squatters par 6 mois d’emprisonnement et 3000 euros d’amende.

- Tziganes et nomades : sans être désignés, les " gens du voyage " sont directement concernés par l’article prévoyant de punir toute installation avec un véhicule sur une propriété privée. Au programme : 6 mois de prison, 3000 euros d’amende, suppression du permis de conduire et confiscation du véhicule.

- Garde à vue et comparution immédiate : le huis clos se généralise. Poursuivant la révision de la loi sur la présomption d’innocence (automne 2001), le régime dérogatoire des gardes à vue, permettant de retenir une personne 96 heures, est élargi aux cas de criminalité organisée ; l’entretien avec un avocat sera repoussé à la 36ème heure pour certains délits ; le droit au silence du gardé à vue sera supprimé ; si les flics ne notifient pas immédiatement ses droits à la personne, ils ne risqueront plus une nullité de procédure ; enfin, les gardes à vue des mineurs de 16 à 18 ans pourront être prolongées sans que les policiers aient à les présenter devant le Parquet.

Compilé à la loi Perben sur la justice des mineurs, le projet de Sarkozy généralise le recours à la comparution immédiate pour tous les délits passibles de six mois de prison : toutes les catégories de personnes " dangereuses " citées plus haut sont donc concernées.

Ajoutées au gonflement des pouvoirs de la police (extension des possibilités de perquisitions sans consentement), ou encore à la généralisation du fichage génétique (le fichier serait élargi à toutes les infractions et aux simples suspects, les informations contenues dans les fichiers nominatifs publics ou privés devraient être communiquées aux OPJ dans le cadre d’une enquête), ces mesures entrent bel et bien dans une politique de guerre ouverte aux indésirables de l’ordre marchand et de quadrillage total de la société par tous les appareils du contrôle social.

La société carcérale et policière que l’Etat nous réserve ne manquera pas de provoquer des réactions outrées de la part des tenants d’un humanisme démocratique aussi vain que généreux. Mais la question n’est décidément pas de savoir quel interlocuteur trouver pour se scandaliser et réclamer l’humanisation de la répression étatique. Il s’agit plus que jamais de répondre frontalement au tout sécuritaire par l’action collective.

Willy


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