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AccueilJournalNuméros parus en 2006N°48 - Avril 2006Mouvement anti-CPE > Nantes - La Censive libre : fac autogérée

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Nantes - La Censive libre : fac autogérée



Face aux réformes du gouvernement Villepin, les étudiantEs des facultés de lettres et sciences humaines de Nantes ont décidé de réagir et ont occupé leur université. La fac est donc bloquée depuis le 14 février, ce qui nous permet de mieux organiser la lutte, de nous informer collectivement, d’élargir le mouvement et de proposer un point d’ancrage à d’autres camarades en lutte contre les réformes ultra-libérales de ce gouvernement illégitime.

Il y a 15 jours, nous avons décidé d’aller plus loin et de transformer ce lieu de résistance afin d’en faire un lieu de vie permanent : de se réapproprier la fac pour se réapproprier nos luttes. Nous avons donc emprunté une cuisine à un collectif, nous avons ramené nos matelas, fours, canapés, bouilloires... Pendant tout un week-end nous sommes partiEs de la récup sur les marchés et à l’extérieur des magasins, un amphi a été bâché pour servir d’atelier, des chambres ont été aménagées, ainsi qu’un coin cool, qu’une salle matos, la cafétéria a été réaménagée (prix libre, voire troc)... Le but étant de se réapproprier le lieu pour en faire notre lieu, pour permettre d’éviter la routine « tram, commission, AG, bourrage de gueule ». À la fin du week-end, nous avons parlé en réunion du retour des copinEs, de l’importance de l’accueil pour qu’ils puissent à leur tour se sentir chez eux.

Nous n’avons pas seulement mis en place un lieu avec des chambres et une cuisine, nous l’avons organisé par la mise en place d’une signalétique et de réunions de fonctionnement. Nous avons donc pris l’habitude de nous réunir chaque soir pour faire un tour des ressentis de chacun, de se dire les unEs les autres comment on a vécu la journée, les questions et problématiques qu’on s’est posées. À partir de ça, nous organisons la suite de l’occupation. Nous tenons un compte rendu de ces réunions que nous affichons pour permettre aux personnes qui le souhaitent de voir comment se vit le lieu. De même, pour permettre à touTEs de s’exprimer et que les réunions ne monopolisent pas toute notre énergie, nous nous sommes fixé quelques règles : un ordre du jour, une personne qui prend les tours de paroles de manière genrée (c’est-à-dire que chaque fois que quelqu’un souhaite prendre la parole, elle note son nom sur un papier : ce qui permet de répartir la parole et de se rendre compte de qui parle plus ou moins et de répartir la parole en fonction).

Depuis 15 jours que nous habitons la fac, nous avons pu avoir de nombreuses discussions : comment organiser une vie collective permettant à chacun d’avoir son rythme tout en faisant de la fac un lieu ouvert à la fête ? Sous quelles conditions organiser un concert ? Si ce lieu est notre lieu, il est normal d’y faire le ménage... Comment faire avec le personnel technique qui risque de ne plus être payé s’il ne travaille pas ? Comment gérer la présence des médias, sous quelles conditions les accepter, jusqu’où peuvent-ils entrer (salle de commissions, cuisine, chambre...) ? Et avec le(s) agent(s) de sécu que la présidence nous impose (dur dur, surtout quand ce sont de pauvres travailleurs précaires qui taffent pour payer leurs études, ou qui travaillent douze nuits d’affilée) ?

Une telle gestion du lieu permet de traiter les questions en profondeur et de se donner le temps d’y répondre collectivement. Par exemple, suite à une occupation de la gare la semaine passée, nous avons été gazés et avons subi une charge des CRS. De retour chez nous, nous avons pu nous réunir et discuter de ce qui s’était passé (pendant trois heures), entre ressentis, partage d’expériences, recherche de suites. Nous avons donc décidé de poser trois rendez vous que nous avons proposés aux autres copinEs l’AG : un échange autour de la violence, de ses différents degrés, de celle que nous pourrions subir / faire subir ; une transmission de savoirs autour des comportements en manif, résistance pendant une occupation, désarrestations... ; et un dernier temps sur le secourisme.

Nous avons aussi eu des discussions autour du genre, ce qui nous a permis de remettre encore plus en question les normes de notre société. Cette discussion a amené à une expérimentation de groupes de discussions non-mixtes et à l’aménagement d’une chambre non-mixte fille.

Hier dans la nuit, des copinEs habitants ont décidé d’aller encore plus loin dans la réappropriation de la fac et de mettre un peu de couleur sur les murs gris. Des portes ont donc été repeintes, des traces de pieds sur le sol, des tags sur les murs... Le lendemain, quelques réactions ont été plutôt violentes : « C’est quoi ces détériorations, ça discrédite le mouvement, on n’est pas chez nous... » De nouveau des discussions ont eu lieu pour permettre à chacun de s’exprimer. On s’est donc demandé à qui appartenait la fac, ce que représentaient des murs gris, ce qu’était une réappropriation, si on se permettait de repeindre sur certains tags (parce que ce qu’ils disaient nous choquait, parce qu’ils étaient moches ?...), si on avait mis en place ce qu’il fallait pour accueillir les copinEs dans ce lieu qui avait encore changé, si on leur avait dit qu’ils pouvaient aussi le transformer... On espère que cela va déboucher sur une réflexion plus générale sur ce qu’est une fac et sur l’importance de son aménagement...

Malheureusement, en ce moment une bande de motivés est en train de repeindre les murs de l’escalier en prétextant une peur de division du mouvement, les gens ne seraient « pas d’accord avec le moche », pas prêts à recevoir dans les lieux du savoir une autre culture que la leur...

Autorequisition du restau universitaire le Rubis

Lundi 13 mars 11h30 : une soixantaine d’étudiant-e-s investissent le restaurant universitaire le Rubis. Leur objectif : se réapproprier de manière autonomone l’organisation d’un repas (accueil - service - plonge - ménage) en proposant aux étudiant-e-s un repas à prix libre. Voici le tract distribué aux 400 étudiant-e-s ayant bénéficié de cette auto-acquisition de richesse (alimentaire), le tout dans une ambiance à la fois décidée, rigolarde et détendue :

Repas de la convergence des luttes

Le projet de refondation sociale proposée par le MEDEF et mis en place par les gouvernements accentue la situation déjà précaire d’un nombre croissant d’entre nous.
Considérant qu’à l’intérieur de ces situations précaires nos droits les plus élémentaires sont continuellement bafoués ;
Considérant que se nourrir fait partie des besoins vitaux et que les politiques d’hier comme d’aujourd’hui ne nous permettent pas de l’assumer de manière régulière et continue, nous avons décidé de nous servir.
Considérant que le RU reste discriminatoire et fermé non seulement à certain-e-s étudiant-e-s mais aussi à l’ensemble de la population, nous vous invitons tous et toutes à participer à cette action symbolique en vous servant au RU de manière gratuite et en vous appropriant cet espace.

Des individu-e-s précaires et étudiant-e-s.


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