Retour accueil

AccueilJournalNuméros parus en 2006N°48 - Avril 2006Mouvement anti-CPE > La Rochelle - Pour un mouvement autonome !

Rechercher
>
thème
> pays
> ville

Les autres articles :


Le mouvement anti-CPE ville par ville

La Rochelle - Pour un mouvement autonome !


À La Rochelle, nous avons participé dès le début aux protestations. Dans un souci de ne pas créer des divergences partisanes, nous avons souhaité coopérer pour la mise en place d’un mouvement autonome, participatif et radical. Sans réelle expérience dans la conduite de ce genre d’interventions, nous nous confrontons à un mouvement frileux, centré sur l’université, faisant l’affaire de certain-e-s leaders étudiant-e-s en mal d’autorité. Nous tentons de faire ici un récapitulatif de notre investissement et des difficultés rencontrées.


Acte 1
Une mise en route timide mais volontaire

Après une première assemblée générale le lundi 13 février à la fac des lettres qui ne regroupe qu’une soixantaine d’étudiant-e-s, une deuxième assemblée se tient le lendemain midi où l’on dénombre plus de 500 participant-e-s exclusivement étudiant-e-s. Le blocage de la fac de lettres, au jour le jour, est voté à une imposante majorité, ce blocage s’étendant ensuite dans la semaine aux différents pôles (sciences, droit et IUT) mais avec une majorité plus limitée. On remarque dès le lancement du mouvement une nette différence entre le nombre de personnes présentes en AG et le nombre de mobilisé-e-s pour les actions (blocage, ateliers, manifestations). Le ton est donné : parler plutôt qu’agir. Beaucoup d’énergie est déployée pour bloquer chaque jour les différents pôles. Aucune action en ville ne s’organise en dehors de l’université durant cette première semaine à l’exception d’un gentil défilé le vendredi après-midi qui réunit 150 étudiant-e-s avec diff’ de tracts vers la mairie.
Dès le mercredi, La Tambouille s’installe dans le hall de la fac de lettres. L’idée est de mettre en place un lieu de vie et de convergence. Finalement, le hall est déserté, le blocus étant approuvé par l’administration. Il y a pourtant quelques initiatives qui se mettent en place en soirée : petit concert et projections. Pourtant, la présence est faible (une quarantaine de personnes), et beaucoup sont insensibles à l’idée d’une cuisine biologique autogérée à prix libre, le R.U. étant situé à 100m. Alors défaut de communication de notre part et / ou manque de curiosité et d’investissement des grévistes ?
Cette première semaine se terminant par les vacances de février, une partie des étudiant-e-s, tout heureux de pouvoir bénéficier d’un repos anticipé, se sont semble-t-il démobilisées.

Acte 2
Parler plutôt qu’agir

De retour des vacances qui furent pour certain-e-s l’occasion de differ aux sorties d’usines et autres administrations, le blocage est reconduit jusqu’à la manif’ nationale du 7 mars. Les AG sont de plus en plus importantes, avec une apparition de quelques profs mais le mouvement reste centré sur le fond et la forme autour du CPE, avec peu d’ouverture vers les lycéen-ne-s et précaires notamment. Cependant, enfin, des actions de blocage sont lancées vers le Conseil général et la gare SNCF. Après une dizaine de jours de mobilisation, la structure du mouvement se précise : s’il y a une bonne volonté de conduire des AG favorisant l’échange des idées, il y a une forte volonté de contrôler les actions de blocage en évitant toute préparation, facilitant ainsi la confusion et la division du mouvement.
De notre côté, nous tentons de proposer une organisation permettant d’allier assemblée et actions facilitant la participation et l’intégration des actifs aux décisions : ateliers en matinée, AG le midi et actions en ville l’après midi avec AG de clôture sur le lieu investi. Si ce mode de fonctionnement semble convenir aux participant-e-s lors du blocage du Conseil général, il est écarté par les chefaillons, ceux-ci préférant conserver une organisation opaque (à l’usure) les décisions se prenant finalement en petit comité, en soirée. Cet événement marque le début d’une certaine hostilité entre les tenant-e-s d’une organisation plus participative et radicale et la direction du mouvement. Elle nous contraint à retirer la cuisine de la maison des étudiant-e-s et à rentrer de force dans une assemblée générale qui nous est interdite d’accès, démontrant le souhait de certain-e-s de confiner le débat aux seul-e-s étudiant-e-s. En outre la contestation du blocus de la fac s’intensifie et la lassitude gagne du terrain.

Acte 3
Vers la fin du mouvement ?

Malgré une large mobilisation lors de la manif du 7 mars, le blocus général de la fac est levé au profit d’un blocus partiel les mardi et jeudi. Ces journées font l’objet d’actions de blocage vers diverses institutions (palais de justice, DDTE, chambre des métiers, gare SNCF...) malheureusement menées par la même troupe de chefaillons en relation étroite avec la police et les renseignements généraux. On est surpris d’entendre dans les défilés des slogans à l’encontre de Sarkozy et de De Villepin et d’observer une réelle collaboration entre les services de l’État et la soi-disante « avant-garde éclairée ». Cette connivence et le manque de détermination dans la tenue des blocages nous exposent aux tentatives d’intimidation des services de police : « serrage » isolé par la BAC fonctionnant telle une police politique, arrestations ciblées suite au blocage de la SNCF.
La manif nationale du 18 mars réunit 7000 personnes à La Rochelle. Elle se résume à une triste déambulation, évitant soigneusement à l’aide du service d’ordre le passage devant la préfecture. On y retrouve néanmoins un cortège libertaire avec No Pasaran, Alternative libertaire, la Fédération anarchiste et la CNT, composé d’une cinquantaine de personnes.
Cependant, on observe à la fin mars un certain désistement des étudiant-e-s en même temps qu’un regain de participation lycéenne apportant plus de bonne humeur et d’énergie au mouvement. Pourtant, on constate une certaine frilosité à poursuivre des actions de blocage qui ne pourraient se terminer que par une intervention de la police. L’idée de s’engager de manière déterminée mais non-violente doit faire son chemin dans la perspective d’accroître le rapport de force initié...
Sur La Rochelle, on regrette que le mouvement ne s’élargisse pas aux précaires et chômeurs-euses, faute d’espaces existants et de forces collectives suffisantes pour les mettre en place. On regrette également que le débat et les revendications ne relient pas la précarité avec le tout-économique, le productivisme et le capitalisme. Il est surprenant de constater à quel point les étudiant-e-s, dans leur majorité, ne remettent pas en cause notre modèle de société, ne souhaitant pas réfléchir et proposer des alternatives.

Fabrice et Pierre


No Pasaran 21ter rue Voltaire 75011 Paris - Tél. 06 11 29 02 15 - nopasaran@samizdat.net
Ce site est réalisé avec SPIP logiciel libre sous license GNU/GPL - Hébergé par Samizdat.net